Les électeurs suisses se sont prononcés, dimanche 9 février, en faveur de la « fin de l’immigration de masse » à une très courte majorité (50,3 %), selon les résultats officiels annoncés. Cette proposition du parti de droite populiste UDC vise à instaurer des quotas à l’immigration et renégocier la libre-circulation avec l’Union européenne. Un tel référendum serait-il envisageable en France ? Eléments de réponse avec Maxime Tandonnet, auteur de « Géopolitique des migrations : la crise des frontières » (Ellipses – mai 2007).
JOL Press : Un référendum « contre l’immigration de masse » est-il envisageable en France ?
Maxime Tandonnet : Non, en tout cas la question posée ainsi n’aurait aucun sens. Elle constituerait une manœuvre d’affichage et de communication. La réalité de l’immigration est un phénomène divers et complexe, elle touche à la famille, au droit au mariage, au droit d’asile, à l’accueil des étudiants et des professionnels, à la lutte contre l’immigration illégale.
Admettons qu’un tel référendum soit voté, que fait-on, concrètement, pour le mettre en pratique ? Le sujet est extrêmement compliqué. On a les grandes proclamations, et la réalité. On ne peut rien résoudre si l’on s’en tient à des généralités.
JOL Press : Pour Manuel Valls, les quotas uniformes sont « la pire des solutions ». Cette politique a-t-elle déjà été expérimentée en France ?
Maxime Tandonnet : Le modèle suisse n’est pas transposable à la France. L’immigration en suisse est à 67% européenne et à forte dominante de travail. Les quotas correspondent à une immigration économique, par pays d’origine et par métier. Ils existent d’ailleurs en Italie et en Espagne, mais ont plutôt amplifié le flux migratoire que permis de le maîtriser.
L’immigration en France est totalement différente, en provenance extra-européenne et reposant pour l’essentiel sur un motif familial ou d’asile ou enfin d’études. Nous avons certes tenté de négocier des quotas ou objectifs chiffrés limités d’accueil de migrants économiques avec une quinzaine de pays dans le cadre des accords de gestion concertée des flux migratoires dans les années 2006-2012.(…)
JOL Press : Quelles sont les autres solutions pour réguler l’immigration ?
Maxime Tandonnet : Je pense vraiment, à l’expérience, qu’il n’y a pas de solution miracle ou globale, en dehors de la démagogie et des postures. En revanche, j’ai la conviction que tout changerait avec du courage et de l’esprit républicain. Il est essentiel de lutter contre les abus en matière d’asile et d’immigration familiale, d’être rigoureux dans la lutte contre l’immigration illégale en raccompagnant les migrants illégaux dans leur pays et en cessant les régularisations, sauf cas humanitaire exceptionnel. En appliquant tout simplement la loi, ce que curieusement aucun gouvernement n’a jamais fait, on réglerait beaucoup de choses.(…)
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