Dans son dernier numéro, Marianne ouvre le dossier Immigration. La démographe Michèle Tribalat regrette la mort du modèle français d’assimilation, le plus à même, selon elle, de protéger la cohésion sociale. Quelques extraits de son interview.
Les classes populaires doivent avoir le sentiment que les populations qui sont là ne cherchent pas à modifier leur mode de vie, à modifier leur environnement.
Officiellement, 200 000 personnes environ s’installent en France chaque année, un niveau faible en comparaison d’autres pays développés, comme l’Allemagne. Vous affirmez que cette présentation masque à la fois l’importance relative de l’immigration par rapport à la population totale et les changements dans sa composition.
«Le même flux d’immigrés que pendant les Trente Glorieuses»
Je n’affirme rien de tel. Le flux d’immigration dépasse 200 000 seulement depuis 2002 (voir la série 1994-2008 établie par Xavier Thierry à l’Ined). Je critique l’usage du solde migratoire pour définir le régime migratoire de la France. Ce solde est le résidu de l’équation démographique de l’année : + 39 000 en 2010 (Insee). Il n’est pas mesuré, comme dans d’autres pays, à partir d’un enregistrement des entrées (que l’on connaît très imparfaitement) et des sorties du territoire (que l’on ne connaît pas). […]
Ils ont un effort de vérité à faire auprès des citoyens français pour leur expliquer dans quoi ils se sont engagé set les conséquences concrètes que ça peut avoir pour les citoyens en France et je ne pense pas qu’il faille s’acharner sur un modèle qui ne fonctionne plus.
Ce modèle d’assimilation est remis en cause par la base avec des populations plus rétives à l’assimilation et aussi par le haut, avec des élites politiques et culturelles qui ont décidé que l’assimilation était ringarde.
La France est engagée dans un modèle multiculturaliste avec l‘Europe et cela depuis près de dix ans.
L’immigration est devenue un problème parce que les gens s’attendent à ce que les nouveaux venus adaptent leur comportement et que eux-mêmes, c’est-à-dire ceux qui sont là depuis longtemps, servent de référents culturels par rapport à ceux qui arrivent. Et c’est cette philosophie-là qui est mise en pièce […]
Marianne