La fondation Jean Jaurès, proche du PS, s’est livrée à une analyse délicate de cet électorat dans une note publiée jeudi, qui extrait des données d’une récente enquête réalisée par l’institut TNS Sofres sur “l’identité des Franciliens”.
Rappelant en préambule que 71 % des sondés se disant musulmans ont voté pour François Hollande en 2012, le directeur général de la fondation, Gilles Finchelstein, montre que la réalité est plus complexe qu’il n’y paraît. Ainsi, si les musulmans questionnés par l’enquête partagent les “valeurs économiques et sociales” ou celles sur “l’identité et l’immigration” généralement défendues par la gauche, il n’en va pas de même des “valeurs culturelles”.
La note de la fondation Jean Jaurès énumère les critères qui rapprochent cet électorat de la gauche : le “désir d’égalité”, la “solidarité” et le “besoin d’Etat” face au marché. Au chapitre des valeurs, les choses se compliquent. Ainsi, le document signale avec “surprise” que 78 % des Franciliens de l’enquête se présentant comme musulmans se sentent “respectés”, avec seulement “9 points de moins que la moyenne francilienne”, loin du thème de la stigmatisation généralement évoqué.
En outre, si 82 % d’entre eux sont favorables au droit de vote des étrangers – une mesure défendue par une partie de la gauche -, ils sont la moitié à juger “qu’il y a trop d’immigrés” (5 points de plus que la moyenne francilienne), et 52 % à considérer que l’on “ne se sent plus chez soi comme avant” (11 points de plus que la moyenne francilienne).
Sur le plan culturel, deux chapitres semblent les éloigner encore davantage de la gauche : l’homosexualité – 83 % n’approuvent pas l’idée qu’il s’agit d’une manière acceptable de vivre sa sexualité, l’inverse de la moyenne francilienne – et les femmes – 65 % partagent l’idée qu’une femme est faite pour avoir des enfants, et 45 % ne considèrent pas comme normal qu’une femme puisse avorter, soit respectivement 40 et 35 points au dessus de la moyenne francilienne.
Le directeur de l’institut Jean-Jaurès met en parallèle ces “musulmans de gauche” et les “cathos de gauche” entrés au Parti socialiste au début des années 1970 avec des proportions comparables, à l’époque, de personnes hostiles à l’avortement ou à l’homosexualité. Il conclut de ces chiffres que “le défi électoral pour la gauche” est le rapport “pour le moins distancié” des musulmans à la politique, “61 % déclarant ne pas s’y intéresser”. Sur ce thème, ni la gauche ni la droite ne semblent avoir trouvé de solution.
Metro News