Tribune du 29 mars 2014 de Sacha Reingewirtz, président de l’Union Des Étudiants Juifs de France (UEJF), dans Libération.
Que retenir de ce tour de France de la fraternité ? Pour beaucoup d’électeurs, le vote FN est d’abord un vote de rejet du socle républicain, et les préjugés racistes en sont une composante puissante.
Fréjus, Brignoles Beaucaire, Cavaillon, Béziers, Perpignan, Forbach, Hayange, la liste des villes en passe d’être conquises par le FN s’égrène. Hénin-Beaumont est tombé. Au bureau de l’UEJF, c’est la consternation.
Ne rien faire : impossible, il faut réagir. Parler, comprendre, soutenir, mobiliser. Se rendre sur le terrain, combattre pied à pied, le danger qui menace le collectif. Relier, d’un trait de plusieurs milliers de kilomètres, les mille visages de la France. Nous nous sommes retrouvés, militants de l’UEJF, dans les visages de tous ceux qui chez eux refusent de voir leur ville sombrer. […]
Arrivée dans le Sud. A Fréjus, la bataille des égos locaux rend impossible le front républicain, et laisse un boulevard au frontiste David Rachline. Pourtant, beaucoup d’habitants ne veulent pas baisser les bras. Ibrahim et Zoher nous invitent à rester pour poursuivre les tractages sur les marchés, les accompagner faire du porte-à-porte. Leur ami Olivier, un industriel offre l’hébergement, met à notre disposition ses moyens pour monter dans la nuit un collage improvisé ! Nous appelons l’ancien ministre François Léotard et la conseillère générale Elsa Di Meo pour poser les premières pierres d’un comité républicain local.
Une soirée s’organise dans le quartier réputé chaud de la Gabbelle où Ibrahim et Zoher nous emmènent dîner dans un kebab et interpellent les jeunes en nous montrant : «Vous savez qui ils sont ? Ce sont les étudiants juifs de France, ils sont venus depuis Paris aujourd’hui pour nous aider à lutter contre le Front National ! Il faut arrêter de nous opposer maintenant, et il faut qu’on se tienne la main !» […]
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