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Dans une tribune publiée en Avril 2012 intitulée « Comment Nicolas Sarkozy a bradé la laïcité », Bernard Cazeneuve s’élevait contre les concepts de “laïcité positive” et l’insistance de Nicolas Sarkozy sur les “racines chrétiennes de la France”. (Les fautes d’orthographe sont d’origines).
La laïcité fut en effet l’aboutissement d’un combat sans merci qui portait comme une synthèse l’aspiration de la République à voir se réaliser les trois ambitions de sa devise : la liberté, l’égalité et la fraternité.
La laïcité désirait que chaque citoyen pût trouver, dans l’indifférence du pouvoir politique à l’égard des croyances et des religions, un chemin pour le libre exercice de sa conscience. Elle fut ainsi le moyen de conforter au cœur de la République la devise de la liberté. Comme elle établissait que l’essence même de l’Homme l’emportait sur toutes les autres appartenances qui pouvaient le distinguer, elle fut un ressort puissant de l’égalité. Enfin, comme dans l’école de la République, dégagée de toute inféodation aux croyances et à leurs églises, elle garantissait l’accès de chacun à la connaissance et formait à la tolérance par l’apprentissage de l’ouverture à l’autre, elle constituait le socle solide de la fraternité.
C’est pourquoi la laïcité renvoie à la notion ancienne de peuple formant un tout, à l’idée d’une indivisibilité par ailleurs inscrite dans notre constitution, à l’unité du peuple français. Cette unité n’est pas un nivellement : elle permet à la République laïque, depuis plus d’un siècle, d’accueillir et d’intégrer en son sein l’ensemble des siens. Désigner chaque jour des boucs émissaires, entretenir l’invective, c’est pousser la République dans les bras du communautarisme.  
La France que nous désirons ardemment n’accepte pas ces discriminations qui éloignent de l’emploi, ou tout simplement de la vie, une grande partie de ses enfants en raison de leurs origines ethniques, religieuses ou sociales. La France que nous désirons ardemment n’a pas peur des musulmans de France, car elle pense la République laïque assez forte pour les intégrer dans le respect de ses valeurs. La France que nous désirons ardemment doit assurer l’égalité républicaine, plutôt que de réinventer les népotismes d’ancien régime. Elle doit tendre la main à tous les quartiers de ses villes, plutôt que de stigmatiser ses banlieues. Elle doit tout mettre en œuvre pour que l’égalité des chances et la méritocratie quittent leur statut de chimère.
Les plus faibles sont toujours les premiers à pâtir des manquements au contrat social et au pacte républicain. Si l’aggravation de leur condition devait les renvoyer à leurs seules origines, à leur dénuement, ou pire encore étendre les discriminations qu’ils peuvent subir, alors le malaise social aujourd’hui perceptible pourrait se muer demain en rage sociale. Il ne resterait plus alors qu’à dire, comme aux heures tristes du bonapartisme : “Il est tant que les bons se rassurent et que les méchants tremblent .”
Le Nouvel Obs

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