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Énorme succès populaire, la réouverture du jardin zoologique de Vincennes témoigne de l’attrait pour les parcs animaliers. Un lieu qui, selon le géographe Jean Estebanez, en dit long sur les relations « humanimales » et sur l’impensé colonial des sociétés occidentales. Entretien.

L’Humanité : Vous parlez des zoos comme d’un « théâtre » de la relation de l’homme à l’animal. Qu’entendez-vous par là ?
Jean Estebanez : Le zoo consiste à construire un discours, ou plutôt un récit, sur ce qu’on estime être la nature sauvage et exotique. On y met en scène, à travers la gestion de l’enfermement et du choix des animaux, une certaine conception culturelle du vivant, avec toutes ses caractéristiques et ses impensés… Ainsi, ce fut ma première surprise lorsque j’ai commencé à travailler sur cette question : il y a une grande stabilité des collections. Quel que soit le lieu du jardin zoologique, vous retrouvez toujours les mêmes animaux charismatiques. Lions, singes ou encore girafes synthétisent à eux seuls l’idée du zoo, que l’on soit au Zimbabwe ou en France. On aurait pu penser, pourtant, que ce type de lieu servirait à rencontrer des animaux qui s’écartent de ceux qu’on a l’habitude de fréquenter dans son contexte culturel. Mais pas du tout : au zoo de Vincennes comme à celui de Niamey, vous trouverez des lions, mais pas de vaches normandes…
Les zoos ne sont donc que la vision exportée de ce que l’Occident considère être l’exotisme…
Jean Estebanez : Exactement. L’exotisme tel qu’il existe est une construction occidentale. Regardez : quand vous parlez de fruits exotiques, ils viennent toujours d’un même endroit, alors que les pommes ne seront pas exotiques, même pour des gens qui habitent le Sénégal… L’exotisme ne relève pas d’un écart avec ce qui est produit localement mais d’un écart avec une norme implicite qui se présente comme ayant valeur d’absolu, en l’occurrence le modèle occidental. Le zoo, avec le choix de ses collections animales ou de ses décors, est un lieu d’impensé politique très fort. L’Afrique y est surreprésentée, ce continent apparaissant, dans le découpage symbolique du monde, comme le lieu du sauvage et de l’exotisme par excellence, en opposition à l’Occident civilisé. (…) Ce n’est pas pour rien, d’ailleurs, que les singes y ont toujours une place de choix…
Lire l’interview dans son intégralité sur le site de L’Humanité
 

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