La CDU estime que la légalisation de la prostitution n’a pas permis d’améliorer les conditions de travail des prostituées et veut revenir à plus de réglementation.
Faut-il interdire la prostitution par la loi ? Alors que la France est en train de pénaliser l’achat d’actes sexuels, l’Allemagne doute de son propre modèle. La voie choisie par Berlin est bien différente de celle empruntée par Paris. En 2002, le gouvernement des sociaux-démocrates et des Verts avait décidé d’abolir «l’immoralité de la prostitution», la rendant entièrement légale. Depuis, la prostitution est reconnue comme un métier à part entière. Les maisons closes sont autorisées tant que les conditions de travail y sont reconnues comme appropriées. Avec cette loi, l’Allemagne espérait sortir les femmes (et les hommes) prostitué(e)s de l’illégalité et de la clandestinité, leur donnant un meilleur statut, des conditions de travail plus sûres et un accès plus facile à la sécurité sociale.
Mais le modèle ne semble pas avoir apporté l’effet souhaité. Le parti conservateur CDU, au pouvoir avec les sociaux-démocrates du SPD, a présenté le 8 avril une proposition de réforme de la loi sur la prostitution. L’idée n’est pas de l’interdire mais de la réglementer davantage. «Si la loi de 2002 découlait de bonnes intentions, elle a entraîné des résultats catastrophiques», constate Hans-Peter Uhl, du parti CDU/CSU, qui a contribué à l’élaboration de la proposition. «L’Allemagne est devenu le bordel de l’Europe», déplore-t-il. De grandes villes comme Berlin, Cologne ou Stuttgart feraient de la publicité pour attirer des clients de l’étranger. A Sarrebruck, à quelques kilomètres de la frontière, 80 % des clients viendraient de France selon la police. […]
«Après la légalisation de la prostitution la criminalité dans ce milieu a augmenté», assure un représentant de la police judiciaire de Stuttgart. Depuis l’élargissement de l’Union européenne vers l’Est en 2007, le nombre des prostituées en Allemagne a fortement augmenté, relève-t-il également. Parmi les filles qui travaillent dans la rue, 87% viendraient des pays de l’Est, surtout de Bulgarie et de Roumanie. L’institut de statistique allemand estime le nombre de prostituées en Allemagne à 400 000. Le chiffre d’affaires annuel s’élèverait à 15 milliards d’euros. Ces estimations restent néanmoins assez vagues, puisque ni les prostituées ni les proxénètes ne sont obligés de déclarer leur activité.
Libération