Extrait d’un rapport très étayé de l’IDDRI (Institut du développement durable et des relations internationales /Sciences Po), présenté dans la presse par son “directeur du programme climat” Thomas Spencer :
Une étude de l’université de Stanford, en Californie, datant de septembre, démontre comme nous que l’impact de la ”révolution” des gaz et pétrole de schiste sur la croissance sera marginale aux Etats-Unis […], et cela malgré la chute spectaculaire du prix du gaz naturel aux Etats-Unis, qui n’est d’ailleurs pas viable à long terme : après avoir plongé jusqu’à 1,95 dollar par million de BTU début 2012, il est remonté à près de 5 dollars en janvier. En fait, d’autres facteurs jouent bien plus sur la croissance et la compétitivité des Etats-Unis que les hydrocarbures de schiste, notamment la baisse du dollar par rapport au yuan chinois et à l’euro…
L’impact [des gaz de schiste] sur le secteur manufacturier a été minimal. […] Les retombées économiques sont très sectorielles. Et très locales : dans les Etats qui en produisent, la croissance du PIB n’est pas beaucoup plus élevée qu’ailleurs.
Aux Etats-Unis les gaz de schiste n’ont pas créé 600 000 emplois, comme l’affirment les porte-parole des pétrogaziers, mais 100 000 : « soit un impact très limité, sachant que la population active américaine compte 155 millions de personnes. »
…Et pour parvenir à ce maigre résultat socio-économique, il a fallu forer des puits à l’infini : « 130 puits par mois en moyenne entre 2000 et 2010, rien que pour l’exploration. C’est une activité industrielle extrêmement intensive. »
Étudiant les perspectives du gaz de schiste en Europe, Thomas Spencer conseille une attitude « agnostique » (la foi dans le gaz de schiste ne relevant pas de l’économie mais d’une sorte de religion). Il ne faut pas rêver, explique-t-il : l’Europe est « plus densément peuplée que les Etats-Unis » et « la résistance locale est forte : regardez ce qui se passe au Royaume-Uni ».
Et l’exploitation des gaz de schiste « ne changerait pas la donne » en Europe, parce que : 1. « même dans les scénarios les plus optimistes, l’Europe resterait largement dépendante des importations de gaz et de pétrole » et les prix « resteront déterminés par les marchés internationaux » ; 2. le gaz de schiste « ne suffirait en aucun cas à résoudre l’équation énergie-climat-compétitivité »
Enfin,« sur le long terme, le coût d’une transition basée sur l’efficacité énergétique, les renouvelables et d’autres sources d’énergie peu carbonées, est égal voire inférieur au business as usual basé sur les fossiles. »