Après seulement deux ans de mandat, François Hollande bat tous les records d’impopularité. Peut-il encore rebondir les trois prochaines années et comment ? L’analyse du politologue Thomas Guénolé.
A la rigueur, il lui resterait pour gagner l’hypothèse d’un duel au second tour face à Marine Le Pen en cas de dispersion des candidatures dans l’opposition. Mais admettez que s’il en arrive à devoir miser sur cette possibilité, ce ne sera guère glorieux.
Alors qu’il lui reste trois ans de mandat, le président de la République est confronté à une impopularité record et dispose d’une majorité de plus en plus étroite à l’Assemblée nationale. Dans ces conditions, peut-il tenir jusqu’au bout ?
Oui. Pour tenir jusqu’au bout de son mandat, François Hollande n’a besoin que de réunir 5 conditions: ne pas démissionner ; ne pas décéder ; ne pas être destitué par le Conseil constitutionnel pour incapacité physique à exercer ses fonctions ; ne pas être destitué par le Parlement à la majorité des deux tiers pour «manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat» ; et ne pas être renversé par un coup d’Etat. Réunir ces conditions est un objectif assez facilement atteignable. […]
Le président de la République a déjà changé de Premier ministre et entamé un virage économique majeur, n’a-t-il pas utilisé ses jockers trop tôt ?
Sans doute était-ce une erreur de changer de Premier ministre juste après les municipales. Mieux valait garder Jean-Marc Ayrault au moins jusqu’au lendemain des élections européennes, pour lui faire encaisser également cette défaite.
Au lieu de cela, si l’on en croit les dernières enquêtes d’intentions de vote, Manuel Valls risque, à peine nommé à Matignon depuis quelques semaines, d’endosser à la fin de ce mois un équivalent européen du 21 avril 2002 : le FN arrivant devant le PS.
Concernant le virage de politique économique, je dirais plutôt que c’est une intensification et une clarification des orientations déjà prises dès le début du quinquennat. Un vrai virage aurait été d’opter pour une politique protectionniste et pour un conflit politique frontal avec le système financier internationalisé: en d’autres termes, passer de la ligne Hollande à la ligne Montebourg ; autrement dit, avec les repères des années 1980, passer de la ligne Delors à la ligne Chevènement. […] Le Figaro