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Alors que la réforme pénale prévoit de multiplier les sanctions sans prison, notre enquête sur le suivi actuel des délinquants « hors les murs » révèle les failles du système.

La France est déjà championne d’Europe du bracelet électronique. Elle le sera davantage encore avec la réforme pénale de Christiane Taubira, qui entend promouvoir les peines alternatives en lieu et place de l’incarcération. Une révolution copernicienne, puisque la prison ne sera bientôt plus la peine de référence. De quoi désarçonner un certain nombre de praticiens, qu’ils soient juges d’application des peines ou conseillers d’insertion et de probation…
«Sur la France entière, en 2013, ce sont 32.000 condamnés qui, à un moment ou à un autre, ont été mis sous bracelet électronique, contre 25.000 en 2011. Soit un stock de 11.000 personnes actuellement», explique Julien Morel d’Arleux, sous-directeur à la Direction de l’administration pénitentiaire. «Des flux et des stocks» de plus en plus conséquents, dont il faut gérer les alarmes quotidiennes…
Au 1er mai dernier, les statistiques affichent 1830 bracelets électroniques pour les huit départements de la région parisienne avec des concentrations très importantes pour la Seine-Saint-Denis, le Val-de-Marne et Paris. Le taux d’incident y est compris entre 10 et 15 % par jour avec des pics le week-end. Lundi dernier, pour le Val-d’Oise, l’administration pénitentiaire a totalisé 53 incidents sur le week-end, soit un quart des bracelets… Un chiffre classique, alors que, si le pôle centralisateur technique fonctionne 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, les centres départementaux, eux, n’ont pas de permanence de fin de semaine.
400 postes de conseillers d’insertion et de probation doivent être créés dès cette année
Du coup, certains tribunaux – Paris a cette réputation – se sont résignés à accorder des permissions qui durent la totalité du week-end et rédigées comme suit: «du vendredi matin au lundi soir après le travail». «C’est vrai, c’est une pratique qui s’étend», avoue un bon connaisseur de l’administration pénitentiaire. «Cela signifie que les condamnés ne restent en réalité sous bracelet électronique que trois jours par semaine!» Au quotidien, le flux est si tendu que les principaux tribunaux, comme Bobigny, qui gère 436 bracelets, et Paris, qui en compte 245, «renoncent à contrôler les incidents, font un classement vertical des dossiers ou, au mieux, demandent un énième rapport à leur conseiller d’insertion avant d’agir. Autant dire qu’entre le moment où l’incident est notifié et l’affaire traitée il peut se passer beaucoup de temps», avoue un juge d’application des peines…
Le Figaro

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