Jean-Pierre Filiu, de Sciences-Po, pointe la montée en puissance des intégristes de l’EIIL en Syrie.
Très bon connaisseur de la Syrie, Jean-Pierre Filiu, professeur à Sciences-Po Paris (1), est considéré comme un des meilleurs spécialistes d’Al-Qaeda.
Que signifie cette implication d’un jihadiste revenu de Syrie ?
Je crains que cela ne soit qu’un début. Depuis des mois, je mets en garde contre l’émergence d’un «jihadistan», aux confins de l’Irak et de la Syrie, sous l’égide d’Abou Bakr al-Baghdadi et de son Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL). Ce jihadistan est beaucoup plus dangereux que ne l’était l’Afghanistan taliban de 1996 à 2001, du fait de sa proximité avec l’Europe et de l’impossibilité de contrôler le flux des va-et-vient, notamment au travers de la Turquie.
L’EILL ne combat plus le régime de Bachar al-Assad et peut donc se concentrer sur l’intégration des «volontaires» étrangers dans les groupes de combat. Ils servent souvent de chair à canon, mais ils sont aussi astreints à recruter des compatriotes et des amis via les réseaux sociaux, ce qui explique la progression exponentielle des départs vers la Syrie.
Aujourd’hui, la radicalisation se fait moins par la fréquentation de sites jihadistes que par Facebook. Certains jihadistes sont aussi formés pour être opérationnels une fois de retour dans leur pays d’origine. D’où le risque croissant, dans un futur proche – on y est peut-être déjà -, d’autres attentats similaires en Europe…