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Tribune libre de Paysan Savoyard

Les sources de l’immigration sont au nombre de trois: l’immigration légale, l’immigration irrégulière et les naissances qui surviennent dans les familles issues de l’immigration. Pour mesurer l’ampleur de l’immigration, il faut déduire de ces flux entrants les départs du territoire et les décès.

Compte tenu de l’ampleur de ces différents flux, nous estimons le nombre total des immigrés d’origine non européenne s’installant chaque année sur le territoire à au moins 400.000. Nous expliquerons comment nous parvenons à ce chiffre en détaillant dans le cadre d’une série d’articles les différentes sources d’immigration. Nous commençons ici par l’immigration légale.

Il n’y a aucun chiffre officiel concernant l’immigration clandestine, les naissances, les départs et les décès. Concernant l’immigration légale en revanche, il existe des données publiques, établies par le ministère de l’intérieur : le nombre des titres de séjour délivrés au cours de l’année.

 

  • Le nombre des titres de séjour délivrés chaque année donne la mesure de l’immigration légale

Le code des étrangers en France prévoit que les étrangers ressortissant d’un pays non membre de l’UE peuvent séjourner sur le territoire jusqu’à trois mois sans titre de séjour. Ils doivent toutefois avoir obtenu au préalable un visa leur permettant d’entrer sur le territoire. Le visa, dont la durée est variable, est délivré par les consulats de France situés dans le pays d’origine de l’étranger. Il peut être refusé.

Les étrangers doivent en outre présenter une attestation d’accueil établie par la personne chez qui ils vont résider (NB : Les étrangers ressortissants d’un pays de l’UE répondent eux à des règles spécifiques en matière d’entrée comme de séjour, que nous évoquerons dans un futur article).

Les étrangers qui proviennent d’un pays non membre de l’UE et qui souhaitent résider sur le territoire national pour une durée supérieure à trois mois, doivent disposer, s’ils ont plus de 18 ans, d’un titre de séjour (ils doivent également être en possession d’un visa, sauf dans certaines situations). Ce titre de séjour est délivré par les préfectures.

L’administration est tenue de délivrer un titre de séjour dans deux cas : lorsque l’étranger demande un titre de séjour pour motif familial ; et lorsqu’il bénéficie d’un contrat de travail dans un secteur ou une zone géographique pour lesquelles existent des difficultés de recrutement. Dans les autres cas elle n’est pas tenue de délivrer le titre. Cependant la personne qui se voit refuser un titre peut introduire un recours, le juge administratif contrôlant la régularité du refus opposé par l’administration.

Il existe plusieurs types de titres de séjour. Les deux principaux sont :

-la carte de séjour temporaire , qui correspond à un séjour d’une durée d’au maximum 1 an. Elle comporte une « mention » correspondant au motif du séjour (visite privée, étudiant, motif familial, activité professionnelle…). Chaque mention correspond à des règles spécifiques (par exemple un visiteur n’a pas le droit de travailler alors qu’un étudiant peut travailler jusqu’à concurrence de 60 % de la durée annuelle de travail d’un salarié). 62.000 nouvelles cartes de séjour temporaires ont été délivrées en 2012.

-la carte de résident, qui est d’une durée de 10 ans. Elle autorise à travailler. 17.000 cartes de résident ont été délivrées en 2012.

Il existe également trois autres titres : certificat de résidence pour Algérien (25.000 en 2012) ; carte de séjour de retraité (226 en 2012) ; carte dite « compétences et talents » (285 en 2012).

Enfin pour certaines catégories d’étrangers, la détention d’un visa de long séjour dispense de demander un titre de séjour. Ces « visas de long séjour valant titre de séjour » concernent par exemple les conjoints de Français, les salariés, les étudiants et les bénéficiaires du regroupement familial. 84.000 visas de ce type ont été délivrés en 2012.

Au total 193.000 titres de séjour de ces différents types ont été délivrés en 2012 à des étrangers non européens arrivant en France métropolitaine.

 

  • Chaque année environ 190.000 immigrés non européens s’installent légalement en France

Le nombre des titres de séjour délivrés chaque année donne la mesure de l’immigration légale qui s’installe en France. Ce nombre est comptabilisé par le ministère de l’intérieur, qui délivre les titres et publié sur le site du ministère.

Précisons que ce nombre porte sur les « premiers titres » de séjour, c’est à dire ceux qui sont délivrés aux immigrés qui reçoivent un titre pour la première fois : les renouvellements de titre ou les changements de nature de titre ne sont pas pris en compte.

Par exemple le titulaire d’une carte de séjour temporaire « étudiant » qui reste en France au terme de ses études et obtient un contrat de travail se voit délivrer un nouveau titre avec cette fois la mention « activité professionnelle » : ce nouveau titre ne sera pas comptabilisé. Le nombre annuel des premiers titres correspond donc au nombre annuel des entrées légales sur le territoire.

En dépit de cette précaution, le décompte des titres de séjour n’est pas un outil parfait pour mesurer l’immigration légale :

– D’abord comme nous l’avons dit plus haut, il ne tient pas compte des ressortissants des pays membres de l’UE qui émigrent en France ;

– Il ne tient pas compte non plus des mineurs arrivant sur le territoire, lesquels sont dispensés de titre de séjour. Cependant les mineurs sont intégrés dans les statistiques des flux d’immigration légale lorsqu’ils atteignent 18 ans : une fois majeurs ils doivent en effet disposer d’un titre de séjour et se voient alors délivrer un premier titre.

– Le décompte des premiers titres de séjour (lesquels correspondent nécessairement à une entrée sur le territoire) ne permet pas de rendre compte parfaitement des flux d’immigration légale parce qu’il ne tient pas compte des départs. Il n’y a pas en effet en France d’enregistrement et de comptabilisation des sorties du territoire.

Autrement dit il est impossible de savoir quelle est la proportion des bénéficiaires des titres de séjour qui s’installent durablement sur le territoire et quelle est la proportion de ceux qui le quittent au terme d’un séjour de quelques mois ou quelques années.

En d’autres termes encore, il est impossible de connaître le « solde » de l’immigration légale, c’est-à-dire les entrées moins les départs (précisons que l’INSEE calcule ce qu’elle nomme un « solde migratoire annuel » : ce chiffre est non pertinent ; nous reviendrons sur ce point dans un prochain article).

On peut cependant penser que la plupart des personnes qui entrent en France pour un séjour supérieur à 3 mois, quel que soit le motif de leur séjour, vont s’installer durablement. La France est l’un des pays les plus généreux vis-à-vis de l’immigration. Ce sont les avantages qu’ils savent pouvoir tirer de l’immigration en France qui ont poussé les immigrés à choisir ce pays : il n’y a donc pas de raison qu’ils quittent le territoire ensuite.

Les départs sont d’autant moins probables que plus le séjour sur le territoire se prolonge, plus il ouvre des droits et des avantages : il permettra par exemple d’obtenir finalement un logement social et la nationalité française…

On peut donc considérer que le nombre des premiers titres délivrés chaque année (environ 190.000 par an, donc, pour la métropole) correspond à peu près à l’arrivée légale d’immigrés supplémentaires venant s’installer.

 

  • 46 % des installations légales correspondent à l’immigration familiale

L’immigration légale a plusieurs motifs, chacun d’entre eux, comme indiqué plus avant, correspondant à un titre de séjour spécifique.

* Les études

Les étudiants reçoivent une carte de séjour temporaire d’un an, renouvelable pour une durée maximale de 4 ans. En 2012, 58.000 nouveaux étudiants ont été accueillis soit 31 % du total des entrées légales.

* Le motif économique

Les étrangers ayant reçu un titre de séjour pour exercer une activité économique (salariée, non salarié ou saisonnière) étaient 16.000 en 2012 soit 8 % du total.

Lorsque l’étranger dispose d’un contrat de travail dans un secteur professionnel connaissant des difficultés de recrutement (la liste de ces secteurs étant révisée régulièrement), la délivrance d’une carte est automatique (article L 313-10 du code des étrangers).

* Le motif familial

Les étrangers placés dans les situations suivantes obtiennent automatiquement une carte de séjour temporaire (article L 313-11) :

– Les membres de la famille d’un Français (conjoint d’un Français ; parents d’un enfant Français mineur). 52.000 titres ont été délivrés en 2012 – Le conjoint et les enfants mineurs d’un étranger vivant régulièrement en France (ils bénéficient du droit au « regroupement familial ») ; 16 000 en 2012 – Les étrangers disposant de « liens personnels et familiaux » anciens et stables en France. 18.000 en 2012.

Au total les étrangers ayant obtenu un titre de séjour pour motif familial ont été 87.000 en 2012, soit 46 % du total des entrées légales.

* Les motifs humanitaires

Le titre peut être délivré enfin pour motifs humanitaires. Les entrées pour ce motif se sont élevées à 18 000 en 2012, soit 9 % du total des entrées légales. Elles sont de deux types :

– L’asile (asile des réfugiés et asile territorial). Plus de 60 000 demandes d’asile sont présentées chaque année (la plupart du temps lors de l’arrivée à la frontière française) : 20 % environ sont acceptées (12 000 asiles accordés en 2012), après une instruction du dossier, effectuée par « l’Office français de protection des réfugiés et apatrides », qui dure 5 mois en moyenne. Le nombre des demandes d’asile augmente constamment depuis 10 ans, la France étant le pays européen qui en reçoit le plus grand nombre. – L’accueil des étrangers atteints d’une maladie grave et qui ne peuvent recevoir dans leur pays les soins appropriés (6 000 en 2012).

* Les motifs divers

L’entrée légale peut correspondre à divers autres motifs (12 000 entrées à ce titre en 2012, soit 6 % du total)

– A titre de visiteur ; – Étranger entré mineur et devenu majeur ; – Accidenté du travail ; – Ancien combattant ; – Titulaire d’une pension de retraite.

Apportons une dernière précision pour la bonne compréhension de ces données. Le recensement des entrées légales croise donc deux informations de nature différente : le type de titre délivré et le motif de la délivrance. Par exemple peut être délivrée pour motif familial soit une carte temporaire soit une carte de résident.

 

  • Parmi les immigrés légaux, on compte chaque année 20.000 clandestins régularisés

Les clandestins qui sont régularisés chaque année se trouvent parmi les bénéficiaires des titres de séjours délivrés.

Les pouvoirs publics décident en effet chaque année de régulariser des étrangers « sans papiers » en situation irrégulière en France. Par exemple les clandestins résidant depuis 10 ans en France ont vocation à être régularisés pour motif humanitaire.

Ces régularisations (ou « admissions exceptionnelles au séjour ») entraînent la délivrance d’un « premier » titre de séjour. Elles sont donc comprises dans la comptabilisation annuelle des premiers titres délivrés et ventilées dans les différents motifs de délivrance.

En 2012 les régularisations se sont élevées à 23 294 (soit 12 % du total des entrées). La quasi-totalité de ces régularisations (21 000 en 2012) relèvent du motif « familial »

En 2013 l’actuel gouvernement a décidé d’augmenter le nombre des régularisations, en demandant aux préfectures (circulaire du 28 novembre 2012) de régulariser les clandestins se trouvant dans différentes situations particulières (par exemple les conjoints d’étranger en situation régulière ; par exemple encore les parents d’enfants scolarisés). Le nombre des régularisations est passé de ce fait à 35.000 en 2013.

Nous traiterons de l’immigration clandestine dans son ensemble dans un prochain article.

 

  • Les Algériens, les Marocains, les Tunisiens et les Chinois sont les plus nombreux à s’installer en France

Les nationalités qui sont les plus nombreuses à obtenir un premier titre de séjour sont : les Algériens (25 000 titres en 2012) ; les Marocains (23 000) ; les Chinois (14 000) ; les Tunisiens (12 000). A eux trois les 3 pays du Maghreb représentent 32 % du total des entrées.

Notons que le classement des pays en tête pour le nombre des entrées est identique depuis 2008.

 

  • Le nombre des installations légales ne cesse d’augmenter

Le nombre des premiers titres de séjours délivrés (autrement dit le nombre des installations légales d’étrangers non européens) augmente presque chaque année depuis au moins vingt ans.

Les chiffres (arrondis) des années pour lesquels des statistiques officielles sont disponibles sont les suivants (précisons qu’ils ne concernent que la métropole): 1997 : 118.000 ; 1998 : 143.000 ; 1999 : 124.000 ; 2000 : 149.000 ; 2001 :164.000 ; 2002 : 181.000 ; 2003 : 190.000 ; 2004 : 191.000 ; 2005 : 187.000 ; 2006 : 183.000 ; 2007 : 171.000 ; 2008 : 183.000 ; 2009 : 194.000 ; 2010 : 196.000 ; 2011 : 193.000 ; 2012 : 193.000.

En additionnant ces données par périodes, il n’est pas sans intérêt d’examiner quelles ont été les statistiques des différents gouvernements qui se sont succédé depuis vingt ans. De 1998 à 2002 (le gouvernement était assuré par M. Jospin, Premier ministre de cohabitation) 152 000 entrées légales ont été accordées par an en moyenne. De 2003 à 2007 (M. Chirac était président de la république), le nombre moyen a été de 184.000. De 2008 à 2012, sous la présidence de M. Sarkozy, le nombre moyen annuel a atteint un niveau record : 191 000.

Il y a lieu de souligner ce point et d’insister sur le comportement de la droite. M. Chirac a autorisé une immigration légale plus importante que ne l’avait fait M. Jospin. M. Sarkozy a été encore plus loin. En 2007 beaucoup d’électeurs avaient probablement voté pour M. Sarkozy avec l’espoir qu’il réduirait l’immigration. Non seulement il ne l’a pas réduite mais il l’a au contraire fortement augmenté.

Il est vrai que les socialistes sont disposés semble-t-il à aller toujours plus loin dans ce domaine. C’est ainsi que pour 2013, selon un chiffre encore provisoire, le total des entrées légales atteint 206.000.

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Après avoir traité de l’immigration légale, nous examinerons dans un prochain article l’immigration clandestine puis la question des naissances issues de l’immigration. Après avoir examiné ces différentes sources de l’immigration annuelle (données de flux) nous terminerons cette série d’articles en traitant la question du nombre des immigrés présents (données de stock).

Comme nous le disions plus avant, nous avons bien conscience de l’aridité de la présente tribune. Encore n’avons-nous exposé que les règles principales. Le corpus du droit des étrangers est en effet spécialement complexe, truffé de règles particulières et d’exceptions.

Cette extrême complexité est à notre avis voulue. Elle offre d’abord aux immigrés, à leurs avocats et à leurs associations de soutien, de multiples points d’appui pour introduire des recours devant les juridictions. Surtout elle permet de rendre le sujet parfaitement opaque à l’observateur : l’oligarchie peut ainsi continuer à développer sa politique immigrationniste en toute impunité.

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