Aujourd’hui, les médecins britanniques ont dû se prononcer sur une mesure qui consisterait à interdire la vente de cigarettes à toute personne née après l’année 2000. Le vote a eu lieu lors de la réunion annuelle des représentants de la British Medical Association (IMC).
Les médecins britanniques constatent que la dépendance des fumeurs adultes est généralement due à une première cigarette qui a été fumée pendant les années de l’adolescence, et l’idée est donc de protéger toute une génération de la tabagie, avec l’espoir de l’éradiquer totalement.
« Fumer des cigarettes est un choix particulier que font des enfants et qui se solde par une addiction qu’il est très difficile de vaincre à l’âge adulte. 80% des gens qui fument ont commencé à l’adolescence. (…) L’idée de cette proposition, c’est d’éviter que ces enfants qui ne fument pas ne commencent à fumer », explique Tim Crocker-Buque, un expert en santé publique à l’origine de la motion. Il souhaite que « la génération du 21ème siècle ne déplore pas les centaines de millions de morts que la génération du 20ème siècle a pleurés. »
Cependant, pour John Tozzi de Bloomberg Businessweek, l’efficacité de cette mesure risque d’être très limitée.
Il rappelle qu’en Angleterre et au Pays de Galles, les enfants de moins de 16 ans n’avaient pas le droit d’acheter des cigarettes jusqu’en 2007, année à partir de laquelle l’âge limite a été porté à 18 ans. D’autres pays interdisent la vente de tabac aux mineurs. Mais malgré ces interdictions, les jeunes parviennent à se procurer des cigarettes.
En outre, une telle mesure risque de développer le marché noir, comme l’avait fait la prohibition de l’alcool dans les années vingt aux États-Unis, et comme c’est encore le cas aujourd’hui avec la drogue. De telles économies souterraines génèrent des coûts sociaux importants.
Une interdiction basée sur une date arbitraire risque de générer des situations absurdes : par exemple, deux amis qui seraient nés à quelques jours d’intervalle, l’un à la fin de l’année 1999, et l’autre après le passage de l’année 2000, pourraient se trouver dans la situation ubuesque où l’un pourrait se procurer des cigarettes, et pas l’autre.
Tozzi observe que l’on assiste à un déclin significatif du tabagisme chez les jeunes aux États-Unis depuis les années nonante du siècle dernier sans que cela n’ait nécessité d’introduire des interdictions ou des restrictions d’âge supplémentaires. Il explique ce phénomène par un ensemble de facteurs tels que la hausse du prix des cigarettes, les restrictions en matière de publicité, et l’introduction de l’interdiction de fumer dans les lieux publics.
La Finlande et la Nouvelle-Zélande ont fixé des objectifs pour que le tabagisme concerne moins de 5% de leur population pour 2025. La philosophie sous-jacente est que la consommation s’évanouira d’elle-même.
« Ces deux pays, comme le Royaume Uni, ou les Etats-Unis, ont encore un long chemin à parcourir, et il n’est pas certain qu’une interdiction générationnelle les mènerait à leur but », conclut Tozzi.