Extraits d’un article de Brice Gruet, sur le blog «Géographies en mouvement» de Libération.
Alors que l’islam est connu des chrétiens depuis des siècles, les préjugés ont la vie dure, et c’est un islam appauvri et comme vidé de lui-même qui est véhiculé par les islamistes. Cela arrange bien les adversaires de l’islam.
Boko Haram au Nigeria, les chababs de Somalie, les talibans d’Afghanistan, ou encore al Qaida un peu partout : autant de noms qui font peur, qui se trouvent agités par les médias et qui renvoient à cette espèce de terra incognita que constitue, finalement, l’islamisme.
Islamisme est un mot commode, qui renvoie à des réalités très différentes. Ceux qui ont connu la fin de la guerre froide et en particulier la guerre d’Afghanistan se rappellent peut-être que les Talibans ont été aidés par les États-Unis dans leur sacro-sainte lutte contre le communisme, l’ennemi d’alors. […]
l’islamisme peut être vu comme un magistral retour de bâton de la part de populations qui ont été dépossédées d’elles-mêmes et longuement humiliées. Il ne s’agit pas de leur donner raison, mais, comme le dénonçait déjà Henri de Monfreid en son temps, l’acculturation des peuples colonisés est une arme à double tranchant. Vous croyez apprivoiser les «colonisés» pour les mieux dominer mais en fait vous faire lever la haine en eux. Les kamikazes des Twin towers de New York connaissaient fort bien la culture «occidentale», mais ils ne la détestaient pas moins.
En fait, nous n’avons pas fini de payer les conséquences de notre domination passée sur tous les pays où l’islamisme prospère à présent. Son terreau reste la misère et l’humiliation. Mais quels en seront ses fruits ? […]