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Persécution des chrétiens d’Irak, guerre israélo-palestinienne, mais aussi émeutes à Barbès et Sarcelles… Pour Bruno le Maire et Pascal Bruckner, les désordres du monde et la volonté de conquête de l’Islam radical sont des menaces qui n’épargnent pas notre pays. (…)
 

Que vous inspirent les émeutes de Barbès et de Sarcelles?

P. B. – Pour la première fois, soixante-dix ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, on a vu des jeunes gens crier «morts aux juifs» en plein Paris. C’est une scène qui fait froid dans le dos. Pourtant, je crois que le conflit israélo-palestinien n’est qu’un prétexte. Manifester pour la Palestine est parfaitement légitime, mais pourquoi casser des abribus? C’est un cri de haine et de rage, non seulement contre Israël, mais contre la France, à laquelle ils ne se sentent pas intégrés ; ils ne sont ni de France ni d’ailleurs. Ils sont des proies idéales pour l’islam radical. Des imams finiront par enflammer ces foules de déshérités, de chômeurs, qui n’ont pas de culture propre et ne cherchent qu’une cible pour exprimer leur rage. Place de la République, le 27 juillet, les manifestants ont fait leur prière de rue par terre, ce qui veut dire très clairement: là où sont des musulmans, là est la terre d’islam. Les prières de rue sont interdites, il a fallu que Marine Le Pen le dise pour que nos politiques réagissent, cadeau formidable fait au Front national.
B. L. M. – Quand une manifestation dégénère en menaces et en actes antisémites, la barbarie gagne la France. Quand des individus ne respectent pas notre histoire, notre nation et la liberté de culte, ils méritent des sanctions exemplaires. Et pour les ressortissants étrangers qui auraient participé à ces débordements, l’expulsion immédiate de notre territoire. Mais je ne confonds pas évidemment les quelques centaines de casseurs, d’islamistes radicaux ou d’extrémistes de gauche avec tous ceux qui veulent exprimer sincèrement et légitimement leur indignation devant ce qui se passe à Gaza. Je continue à défendre la liberté de manifester et un encadrement strict des manifestants.
Quelle est la solution pour apaiser ces fractures françaises?
B. L. M. – Je ne vois pas d’autres solutions que la réaffirmation de la nation. Qu’est-ce qu’être français? C’est connaître et respecter l’histoire de France, la langue française, les traditions françaises. La réponse à la barbarie, c’est l’éducation, c’est l’histoire, c’est la réaffirmation de la nation. Mais la réponse immédiate, c’est aussi la fermeté la plus totale dans la réponse policière et pénale face à ces débordements. Je crois à l’exemplarité des sanctions. Face à la barbarie, il doit y avoir en face un État républicain avec une main de fer. Nous sommes à la croisée des chemins: il faut choisir entre la nation et le communautarisme. Lorsque François Hollande a évoqué le droit de vote des étrangers aux élections locales le 14 juillet dernier, il a choisi son camp: celui du communautarisme. Cela revient à briser un principe fondamental de la République: le lien entre citoyenneté et droit de vote. Moi, je choisis le camp de la nation.
Comment expliquer cette communautarisation?
B. L. M. – Avant tout par notre faiblesse à défendre les principes républicains et par notre incapacité à maîtriser notre immigration. Mais elle s’explique aussi par nos échecs économiques, par notre incapacité à offrir un avenir décent à chacun. Il est urgent de proposer un nouveau modèle économique, il est indispensable de rappeler les principes intangibles que sont l’égalité homme-femme et la séparation totale du pouvoir séculier et du pouvoir religieux.

P. B. – L’ouverture de la France à une immigration indiscriminée d’abord au nom de raisons économiques puis au nom du regroupement familial a provoqué des tensions que nul n’a voulu reconnaître sauf le Front national, auquel on a malheureusement laissé le monopole de la nation. L’«immigrationnisme», qui agite un certain nombre de nos élites, considère que les pays sont assimilables à des boîtes de petits pois qu’on remplit d’individus les uns après les autres et que ces individus devraient s’entendre et s’aimer naturellement quelles que soient leurs origines! François Mitterrand avait parlé de seuil de tolérance, cela me paraît relever du bon sens et n’a rien de discriminatoire. La crise française est aussi psychologique. Les tensions et la montée de l’islamisme dans les banlieues se greffent sur un pays qui, de l’avis des historiens, ne s’est jamais remis complètement de la défaite de la Seconde Guerre mondiale et qui vit une profonde crise d’identité nationale.
Avons-nous été trop loin dans la repentance?
B. L. M. – Nous avons longtemps confondu mémoire et repentance. Quand Jacques Chirac en 1995 admet la responsabilité de l’État français dans les crimes de Vichy, c’est libérateur pour la société française. En revanche, lorsque nous faisons œuvre de repentance et que nous nous couvrons de tous les crimes de la planète, nous ne libérons pas le peuple français, nous l’enfermons dans le remords. La mémoire est positive et constructive. La repentance pèse et enferme. Je choisis la mémoire contre la repentance.
P. B. – La repentance a été longtemps notre seule identité. Exister, c’était s’excuser. Voilà ce qu’on exigeait des Français qui devaient battre leur coulpe à chaque événement. De la même manière, dès que nous réaffirmons l’identité nationale, nous sommes accusés de racisme. Sur ce plan, il faut parler d’une curieuse asymétrie. Le mot «islamophobie» est devenu un moyen d’assimiler toute critique de l’islam à du racisme. En revanche, personne ne parle de christianophobie. L’exode des chrétiens d’Orient et la persécution des coptes ne sont jamais qualifiés de christianophobes. J’ai envie de dire aux chrétiens: «Réveillez-vous! Ne tendez pas la joue gauche! Ne vous trompez pas d’ennemi: l’ennemi n’est pas la République laïque qui vous protège, mais ceux qui veulent vous convertir de force ou vous transformer en minorité soumise à l’impôt.» Aujourd’hui, presque toutes les synagogues et écoles juives de France sont soumises à une surveillance policière. Si nous continuons comme ça, demain il faudra mettre des policiers devant chaque église.

Quelle laïcité défendre?
B. L. M. – Je me méfie des adjectifs qu’on ajoute à la laïcité. Il ne peut pas y avoir de laïcité positive pour les uns et de laïcité négative pour les autres. Tout le monde doit être traité de la même façon. Il faut refuser les menus différenciés dans les cantines, refuser les horaires différenciés dans les piscines. Dans les services publics, notamment à l’école ou dans les hôpitaux, il s’agit d’un combat de tous les jours… Il s’agit de préserver la liberté de conscience de chacun, les us et coutumes de la France. Quand on commence dans la voie des accommodements, on finit dans la résignation et on aboutit au communautarisme. Il est très important que la France réaffirme qu’elle est une nation: une culture, une langue, une géographie particulière. Le principal défi que nous aurons à relever sera de faire vivre ensemble des communautés religieuses différentes. Il faut faire toute sa place à l’islam dans la République et la nation, mais ne pas faire évoluer les principes de la République et de la nation en fonction de l’islam.
P. B. –La laïcité, c’est le plus beau cadeau de la France au monde. Il faut rappeler que nous avons la plus forte communauté musulmane d’Europe et la plus forte communauté juive. Notre devoir est de faire cohabiter tous ces gens sans heurt et d’arriver à une pacification de l’esprit religieux qui avait été parfaitement réussie avec le catholicisme et qui a été relancée avec l’irruption massive de migrants en provenance du Maghreb et d’Afrique subsaharienne. Le défi est de choisir entre la minorité active qui veut islamiser la France et ceux qui veulent franciser l’islam.
Le Figaro

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