Malgré les avis des scientifiques, le gouvernement indien avait décidé, en juillet, d’élargir les OGM en plein champ à de nouvelles cultures, parmi lesquelles l’aubergine, premier légume consommé dans le pays. Une décision qui divise, y compris au sein du mouvement national-hindouiste.
Le gouvernement indien vient de céder à la pression de la société civile. Et de reculer sur les essais en plein champ de plusieurs variétés d’OGM. En effet, le 15 juillet, le gouvernement indien avait donné son feu vert pour la mise en culture en plein champ, à des fins expérimentales, de 21 plantes, dont le coton, le riz, la moutarde et l’aubergine.
Une décision prise contre l’avis de plusieurs commissions scientifiques, et en dépit de toutes les promesses faites pendant la campagne par le Bharatiya Janata Party (BJP, Parti du peuple indien, formation national-hindouiste, au pouvoir depuis mai 2014), comme le rappelait quelques jours plus tard un éditorial de Jansatta, un grand quotidien en hindi.
“Dans son programme électoral, le BJP s’était engagé à ce qu’aucune décision ne soit prise pour étendre les expérimentations sans évaluation scientifique préalable. Encore une fois, le ministère de l’Environnement s’est assis sur ces promesses et sur les recommandations des scientifiques. […]
Le ministre de l’Environnement, Prakash Javdekar, qui enthousiasme les milieux industriels, ne s’inquiète pas [des dangers des OGM] et a déjà pris pas mal de mesures anti-écologiques“, s’insurgeait le journal. Et “le but est évidemment d’ouvrir la voie à une généralisation de cette pratique” et de satisfaire les grosses entreprises comme Monsanto.
Les agriculteurs – et notamment les producteurs d’aubergines, premier légume consommé dans le pays – se sont mobilisés, et de nombreuses manifestations ont eu lieu pour protester contre cette mesure. Deux groupes en particulier, le Swadeshi Jagran Manch, un groupe de pression en faveur du nationalisme économique, et le Bharatiya Kisan Sangh, un syndicat paysan, se sont dressés contre cette décision. Ils sont parvenus, le 29 juillet, à la faire suspendre, au moins de façon provisoire.
Le gouvernement ne devrait pas reculer
Ces deux formations appartiennent toutes les deux au Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS, Association des volontaires nationaux et maison mère du national-hindouisme), tout comme le BJP, qui est la branche politique de ce mouvement. Et “c’est la première intervention réussie de ces groupes dans le domaine économique“, note le Business Standard. C’est en effet la première fois que des groupes appartenant au RSS s’opposent à une décision du BJP, issu également du RSS. La question des OGM est donc en train de provoquer la première division visible au sein de la mouvance national-hindouiste.
Pourtant, même si des précautions doivent être prises, ce mouvement met en danger le développement de variétés génétiquement modifiées locales, et c’est pourquoi le gouvernement ne devrait pas reculer, indique le même magazine dans un éditorial publié le 30 juillet et intitulé : “Contre la science“.
Pour l’heure, seul le coton Bt, mis au point par Monsanto et qui produit un insecticide pour lutter contre le ver de la capsule, est cultivé en Inde. Il est autorisé depuis 2002 et représente plus de 90 % des cultures de coton du pays. Mais des résistances sont apparues. Et l’utilisation massive de cette variété a ouvert la porte à d’autres insectes ravageurs. En août 2012, l’État du Maharashtra, dans l’ouest de l’Inde, a d’ailleurs interdit à Mahyco, le distributeur local de Monsanto, de vendre les semences de son coton OGM.
(Merci à Tilak)