Tribune d’Alain Duhamel dans Libération.
En 2014, la gauche française est en train de se faire hara-kiri. Elle s’ouvre le ventre comme la gauche allemande dans les années 30. […] Pire : au sein même du Parti socialiste, les militants sont effondrés, les électeurs, pleins d’amertume et de ressentiment, se débandent, les frondeurs se transforment en snipers fanatiques. […]
Au lieu d’une compétition légitime gauche – centre – droite, le risque évidant est d’aboutir à une confrontation brutale droite – extrême droite, avec une droite nettement plus déchirée qu’en 2012 et une extrême droite beaucoup plus puissante.
François Mitterrand n’était peut-être pas vraiment de gauche mais nul ne pouvait discuter sa stature présidentielle. Aujourd’hui, la majorité se fissure, éclate et rétrécit jusqu’à devenir artificielle. François Hollande et Manuel Valls ne disposent plus que d’une majorité parlementaire négative. Dans le pays, la gauche est une minorité aux abois qui ne tient que par les robustes institutions. C’est d’ailleurs pour cela que Jean-Luc Mélenchon rêve d’une VIe République : il faut briser le dernier parapet. […]
En fait, on constate plus que jamais qu’il existe deux gauches faites pour ne pas s’entendre.
La conséquence quasi inéluctable de cette décomposition suicidaire est que grandit à chaque épisode le spectre d’un nouveau 2002, et même d’un 2002 en pire. Les circonstances peuvent s’améliorer d’ici au printemps 2017, le climat a fort peu de chance de s’inverser. Les fractures de la gauche ne peuvent que s’accentuer : Jean-Luc Mélenchon, Cécile Duflot, Arnaud Montebourg appliquent déjà une stratégie personnelle présidentielle, d’abord diriger contre François Hollande.
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