5,60 euros, c’est ce qui reste chaque jour pour vivre, après avoir payé loyer et autres charges, à des milliers de personnes aidées par le Secours populaire, qui juge dans une étude rendue publique jeudi que “la pauvreté s’étend et s’enracine“.
“Malheureusement, la pauvreté et l’exclusion continuent de gagner du terrain, mais on peut lutter et développer une nouvelle résistance“, a insisté le président du Secours populaire Julien Lauprêtre, lors d’une conférence de presse.
À partir de données recueillies auprès de 161 572 ménages (sur les 619 700 familles aidées par l’association en 2013), le Secours populaire souligne qu'”une part croissante de la population en est réduite à survivre”.
Parmi ces personnes, une petite moitié (46,7 %) a donné des informations sur ses ressources (salaire, RSA, prestations familiales, aides au logement, etc.) : 30 % d’entre elles disposent de ressources inférieures à 750 euros, pour 43 % elles sont comprises entre 750 et 1.250 euros et pour 20 %, elles s’échelonnent entre 1.250 et 1.750 euros.
En moyenne, leur revenu “disponible pour vivre” est de 5,60 euros par jour et par personne pour faire face aux besoins alimentaires et vestimentaires, une fois acquittées les charges obligatoires (logement, fiscalité, transport, garde d’enfants, activités extrascolaires et crédits).
“J’ai de la chance…“
Parmi elles, 19 % ont un disponible pour vivre par jour et par personne compris entre 0,5 et 3 euros, et 27 % entre 3,5 euros et 5 euros. Enfin, pour 6,5 % de ces personnes, ce disponible pour vivre est “négatif ou nul”.
Après “des années de chômage et de galères“, Gwenaël, 40 ans, s’est retrouvé à la rue, avant d’obtenir une chambre d’hôtel. Bénéficiaire du RSA et d’une allocation logement, il dispose de 718 euros par mois. Mais une fois retranchés son loyer (550 euros), une dette de 55 euros, et des frais dentaires, de téléphone, de lessive et de tabac, il lui reste 25 euros mensuels pour ses besoins alimentaires et vestimentaires. “J’ai de la chance de ne pas avoir de gros problèmes de santé“, dit-il.
“Je ne peux pas me soigner les dents“
Une précarité qui touche toute la population. Dans le baromètre annuel Ipsos sur la perception de la pauvreté par les Français que l’association dévoile aussi ce jeudi, 55 % des personnes interrogées déclarent avoir été sur le point de connaître la pauvreté et 35 % d’entre elles ont vu leur crainte se matérialiser en 2014.
Enfin, une majorité des sondés (66 %) dit connaître un proche en situation de pauvreté, dont 29 % dans leur propre famille, et 86 % estiment que leurs enfants ont plus de risques qu’eux-mêmes de tomber dans la pauvreté.
Conséquences : les soins sont hors de portée pour beaucoup. 19 % ont renoncé au moins une fois à l’achat de prothèses dentaires et 13 % l’ont retardé de plusieurs mois, tandis que 18 % ont renoncé à se rendre chez le dentiste et 10 % ne l’ont fait qu’au bout de plusieurs mois. 14 % ont également retardé l’achat de lunettes ou de lentilles, 17 % une consultation ophtalmo, 13 % l’achat de médicaments et 10 % une consultation chez un généraliste.
“Je ne peux pas me soigner les dents“, raconte Véronique, Marseillaise de 56 ans. “J’ai besoin d’un appareil dentaire, mais ça m’obligerait à faire un nouveau crédit“, dit cette auxiliaire de vie, qui gagne 1 200 euros par mois, pour un loyer de 580 euros. “Et mes lunettes, ça fait 10 ans que je les ai, elles ne sont plus à ma vue.”
Sondage réalisé du 4 au 5 juillet 2014 auprès de 1 006 personnes représentatives de la population française de quinze ans et plus (méthode des quotas).