Une véritable explosion. La fraude aux cotisations sociales a représenté, en 2012, des sommes de l’ordre de 20 à 25 milliards d’euros, révèle mardi la Cour des comptes dans un rapport à paraître mercredi 17 septembre. Soit le double par rapport à 2007. Concrètement, la fraude a atteint entre 16,8 et 20,8 milliards d’euros en 2012.
Mais une fois élargie à l’assurance-chômage et aux retraites complémentaires obligatoires, cette fraude est estimée à entre 20,1 et 24,9 milliards, soit environ 5% des cotisations et contributions sociales. Les secteurs de la construction et du commerce occupent la tête de peloton, avec respectivement 3,8 milliards et 3,3 milliards de cotisations “éludées”.
Le rapport inclut dans ces montants la fraude à proprement parler, essentiellement au travail dissimulé, mais aussi les simples irrégularités. Parmi elles : les erreurs et omissions involontaires, l’ignorance ou encore la mauvaise interprétation du droit. L’institution souligne que “la distinction entre les différents types de fraudes est complexe” à établir.
Quand la mondialisation brouille les pistes
Dans ce document, la Cour des comptes s’inquiète notamment de nouvelles formes de fraudes “difficiles à combattre”. Elles sont dues, entre autres, à la mondialisation des échanges, au développement du marché unique européen (qui réunit des pays dont les niveaux de protection sociale sont “très inégaux”), mais aussi à l’augmentation des transactions dématérialisées.
“La fraude transnationale, la sous-traitance en cascade, les faux statuts, les circuits de financement occultes compliquent la tâche des agents chargés du contrôle des cotisations“, assure la Cour des comptes.
La délicate question des travailleurs détachés
Ainsi, parmi les “nouvelles” formes de fraudes, la délicate question des travailleurs détachés à l’étranger, pour lesquels s’appliquent le droit du travail du pays d’accueil et celui de la sécurité sociale du pays d’origine est pointée du doigt. La “tentation” existe pour certaines entreprises de présenter des salariés comme des travailleurs détachés, afin de payer des cotisations à des taux moins élevés.
Ces pratiques pourraient expliquer, “en partie”, la hausse du nombre de travailleurs détachés à 170.000 en 2012, contre 7.500 en 2000.
Des employeurs et indépendants peu contrôlés
A noter aussi la fraude liée au statut de “travailleur indépendant” : certains employeurs détournent le statut d’auto-entrepreneur pour des salariés. En outre, la fraude des particuliers employeurs reste “difficile à détecter et à réprimer“, tandis que les régimes de retraite complémentaire ne font toujours pas l’objet de contrôle.
Face à ces pratiques, le taux de recouvrements reste dérisoire : environ 1,5% de la fraude liée au travail dissimulé, hors retraites complémentaires et chômage. Le niveau des redressements est inférieur à 1 milliard d’euros en 2013.
Dans ce contexte, la Cour des comptes appelle à un renforcement des moyens d’investigation, regrettant qu’il n’y ait pas l’équivalent de la “police fiscale” dans ce domaine. Elle appelle aussi à une augmentation de la majoration des redressements en cas de constat de travail dissimulé (actuellement à 25%).