Si Sigmar Gabriel, le ministre de l’économie et président du parti social-démocrate (SPD) tient ses promesses, l’Allemagne devrait, dans les années à venir, exporter nettement moins d’armes. Elle pourrait aussi compter moins d’acteurs dans ce secteur.
Vendredi 5 septembre, à l’issue d’une première rencontre avec des responsables patronaux et syndicaux du secteur, le ministre de l’économie, à qui il revient d’accorder ou non les autorisations d’exportation de matériel militaire, a confirmé sa politique.
LA LOI EST « CLAIRE »
Hors pays de l’OTAN et de l’Union européenne, « les exportations d’armes sont en principe interdites ». Les autorisations doivent être exceptionnelles.
Si la loi allemande est « claire » selon lui, il admet que ses prédécesseurs n’ont pas tous été aussi regardants. L’Allemagne serait même devenue le troisième exportateur d’armes, derrière les Etats-Unis et la Russie. « Mais le monde a totalement changé », explique Sigmar Gabriel.
Le contrat de coalition signé entre la CDU, la CSU bavaroise et le SPD comporte deux engagements « pas facilement compatibles », selon le ministre : il réitère l’interdiction d’exporter des armes de guerre hors de l’OTAN et de l’Union européenne, sauf si les intérêts de l’Allemagne sont menacés, mais il entend que l’industrie allemande de la défense reste « innovante et compétitive ».
700 DEMANDES D’AUTORISATION À L’ÉTUDE
Sigmar Gabriel a déjà mis en œuvre le premier point. Au printemps, il a interdit l’exportation d’un centre de formation militaire que Rheinmetall s’apprêtait à vendre à Moscou pour plus de 100 millions d’euros.
Pourtant les sanctions européennes contre la Russie ne sont pas supposées concerner les accords déjà conclus.
Les services de Sigmar Gabriel sont actuellement en train d’étudier 700 demandes d’autorisation d’exportations. Il est probable qu’un certain nombre seront rejetées, ne serait-ce que parce qu’une centaine concerne la Russie.
D‘ailleurs, malgré son soutien affiché à Kiev, l’Allemagne refuse même d’exporter des gilets pare-balles à l’armée ukrainienne car ceux-ci sont considérés comme du matériel militaire, au même titre qu’un fusil d’assaut.
AIDES À LA RECONVERSION
Reconnaissant que sa politique va entraver le développement de ce secteur – qui emploie, selon les définitions, entre 20 000 et 100 000 personnes – le ministère dispose d’une enveloppe de 10 millions d’euros pour aider les entreprises à se reconvertir dans le secteur civil.
Le ministre a également évoqué des aides aux PME émanant de la KfW, la Caisse des dépôts allemande.
Surtout, il veut favoriser « une consolidation à l’échelon national et à l’échelon européen ».
POUR UNE UNION NATIONALE DANS LES CHARS
Or il se trouve que la deuxième entreprise du secteur, Krauss-Maffei Wegmann (1,1 milliard d’euros de chiffre d’affaires uniquement dans le secteur de la défense) a annoncé son intention de fusionner avec le français Nexter.
A la fois pour limiter la concurrence et, dit-on, pour profiter des licences d’exportation françaises plus faciles à obtenir.
Sigmar Gabriel préférerait que KMW fusionne avec le leader allemand du secteur, Rheinmetall avec qui il fabrique les chars Leopard et Puma.
Mais les actionnaires KMW préfèrent s’associer à un Français qu’à leur concurrent allemand.