J’arrive «aux Minguettes» au collège Paul Eluard à Vénissieux dans la classe de 6e. La jeune professeur d’histoire-géographie a bien préparé ses élèves. Je suis là pour la première séance du jeu «l’Arbre à défis».
Défi du « Mot inconnu » avec le lieu « La Mecque ».
L’équipe choisie pour ce défi est très excitée du mystère qui plane autour du mot secret. Tous connaissent La Mecque, avec cependant pas mal d’approximations. Par exemple, le mot «pèlerinage» ne sort qu’avec mon aide. Le mot « musulman » vient en premier, comme celui de «mosquée».
Le mot inconnu est très vite trouvé, puis une élève lit le texte correspondant devant ses camarades. Elle a une bonne diction jusqu’à la lecture des mots «Al Masjid Al Haram» ; elle a du mal à s’empêcher de rire en le lisant car elle bute sur la langue. Mais en même temps, elle est très gênée, surtout quand une élève s’exclame : «C’est pas bien ! Il faut pas rire quand on parle de ça !».
Leur professeure intervient : «laisse la s’exprimer et ne lui fais pas la morale ». L’élève poursuit sa lecture, en s’appliquant pour les deux derniers mots en arabe: «Ka’ba» et «hadj».
Ce petit incident souligne bien que pour ces 24 élèves, dont 21 sont musulmans, ce n’est pas si facile de faire référence à sa culture.
S’ils en sont fiers, ils n’ont pas tous les éléments pour bien l’assimiler : ici la connaissance de la langue arabe. Il y a comme une gêne à en parler, comme si cela leur rappelait une fois de plus cette origine qu’ils ont parfois du mal à assumer.
A ce moment me revient en mémoire une chanson du groupe Zebda qui fait référence à cette double appartenance, parfois difficile à vivre. A-t-on vraiment réalisé ce que cela représente pour eux de vivre cette double culture ? Le chemin est long pour qu’elle signifie, pour eux, une richesse…
Défi «Vrai ou faux» avec le mot «mosquée»
Comme les élèves connaissent tous bien ce mot, et qu’ils ont bien écouté le texte que j’ai lu, les bonnes réponses sont nombreuses ; les points s’accumulent pour chaque équipe, l’arbre s’étoffe, et ils sont heureux !
Défi des «stéréotypes» avec la photo d’un visage d’homme au teint basané, portant un turban sur la tête
Il s’agit de trouver la religion de cet homme, après leur avoir montré sa photo : est-il musulman, chrétien ou juif ? J’écoute leurs discussions. A aucun moment, une équipe n’imagine qu’il est chrétien, car l’élément déterminant pour eux, auquel je n’avais pas pensé, est la «gandoura», cette sorte de chemise longue sans col portée par cet homme.
Les avis sont cependant partagés : trois équipes pensent qu’il est musulman, et une équipe, qui «sent» le piège, affirme qu’il est juif, «sinon ce serait trop facile !». Pas une n’a imaginé qu’il pouvait être chrétien : or cet homme est copte. Grosse déception : «Ben comment on pouvait savoir ?! Il avait l’air d’un arabe… ».
J’enchaîne pour dénouer avec eux l’amalgame entre «arabe» et «musulman». L’un fait référence à une appartenance géographique, historique, l’autre à une appartenance religieuse.
Ce n’est pas simple, et il faudra qu’ils le reprennent avec leur professeure, qui pourra s’aider des cartes «arabe» et «musulman» de notre jeu.
Danielle André, est experte associée à Enquête, dirigée par Marie Quenin
Extrait d’un article de Fait religieux.com
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Complément sur l’association “Enquête”
Marc Cheb Sun, auteur, éditorialiste, “spécialiste™ des sociétés métissées™” , en est l’administrateur.
Il accompagne de 2000 à 20005 l’association Terres d’Europe qui défend la construction d’un islam européen. Fondateur en 2004 du magazine “urbain, social et métissé” Respect Mag. Chevalier de la Légion d’honneur en 2013, il a initié différents manifestes sur le thème “islam et citoyenneté“, ainsi qu’une réflexion sur ce sujet au sein de la Fondation Terra Nova et un “Appel pour une République multiculturelle et post raciale” avec Lilian Thuram, Rokhaya Diallo, Pascal Blanchard et François Durpaire. Source
