Extraits d’une tribune, publiée dans Libération, de Dominique Reynie, directeur général de la fondation pour l’innovation politique, Gilles Finchelstein, directeur général de la fondation Jean-Jaurès, et Simone Rodan, directrice de American jewish Committee, sur la lutte contre l’antisémitisme, “une lutte pour la République”.
Dix ans après le rapport Rufin, comment lutter efficacement contre l’antisémitisme et en finir avec la tension générale qui mine nos sociétés ? Dix années se sont écoulées depuis la publication du rapport sur «la lutte contre le racisme et l’antisémitisme» rédigé par Jean-Christophe Rufin. Ce rapport avait fait grand bruit. Il était novateur et devait aider à la construction du paratonnerre d’une nouvelle France qui prenait à bras-le-corps l’un des défis majeurs du XXIe siècle.
Le contexte s’est dégradé. Il y a plus que jamais une tension générale de nos sociétés qui s’exprime notamment par une cascade infinie de ressentiments.
Pour beaucoup de nos concitoyens la différence de l’autre est ressentie comme une menace et une injustice, reléguant ainsi le vivre ensemble à un concept «has been». La confiance envers l’Etat et le politique s’est quasiment évaporée. L’«antisystème» est devenu une idéologie, récupérée par de nombreux populistes et extrémistes. Il y a une indifférenciation des mots de plus en plus forte : lorsque tout peut être dit, il n’y a plus rien d’indéfendable.
Dans ce contexte, la situation spécifique de l’antisémitisme est très préoccupante. Certes, les Français dans leur globalité ne sont pas antisémites. Pourtant, depuis dix ans, le nombre d’actes et de menaces antisémites reste dramatiquement élevé. […]
PREMIER PILIER : LES PRINCIPES
La lutte contre l’antisémitisme ne concerne pas que la communauté juive mais la communauté nationale tout entière : s’en prendre à certains citoyens de la République, c’est viser la République dans son ensemble. L’efficacité de cette lutte suppose de veiller à contenir le retour du religieux dans la sphère politique et de proscrire ensemble toute concurrence victimaire.
DEUXIÈME PILIER : L’EFFICIENCE DE LA LOI
La France dispose du meilleur arsenal juridique en la matière mais encore faut-il appliquer la tolérance zéro et donner aux institutions chargées des moyens suffisants pour la faire appliquer. […]
TROISIÈME PILIER : LA PÉDAGOGIE
La lutte contre l’antisémitisme doit aujourd’hui se concentrer davantage encore là où elle est la plus urgente, notamment chez les jeunes et dans les milieux populaires en particulier parmi les jeunes issus de l’immigration. Nous devrons trouver d’autres icônes que les seuls responsables politiques et les représentants de l’État. […]