L’écrivain et universitaire tunisien Abdelwahab Meddeb est mort ce jeudi. En 2006, il revenait, pour «Libération», sur les différentes interprétations du Coran et l’intégrisme d’aujourd’hui. […]
La violence dans l’islam est-elle une réalité ?
Les musulmans doivent admettre que c’est un fait, dans le texte comme dans l’histoire telle qu’ils la représentent eux-mêmes, en un mode qui appartient plus à l’hagiographie qu’à la chronique. Nous avons à faire à un Prophète qui a été violent, qui a tué et qui a appelé à tuer. La guerre avec les Mecquois fut une guerre de conversion. Il y a eu aussi la guerre avec les juifs et le massacre des juifs à Médine, décidé par le Prophète. Il y avait un jeu d’alliances, une opération politique qui se continue par le militaire.
Que dit précisément le Coran ?
Il est ambivalent. Il y a le verset 256 de la deuxième sourate qui dit «point de contrainte en religion». Mais aussi les versets 5 et surtout 29 de la sourate 9, «le verset de l’épée», où il est commandé de combattre tous ceux qui ne croient pas à «la religion vraie». L’impératif qâtilû, que l’on traduit par «combattez»,utilise une forme verbale dont la racine qatala veut dire «tuer». Le verset 5 est explicitement contre les païens et les idolâtres, aménageant, en revanche, une reconnaissance aux scripturaires, aux gens de l’écriture. Le verset 29, lui, englobe dans ce combat les scripturaires désignant nommément les juifs et les chrétiens. C’est le verset fétiche de ceux qui ont établi la théorie de la guerre contre les judéo-croisés. L’islamisme est, certes, la maladie de l’islam, mais les germes sont dans le texte lui-même. […]
——- Complément : autre interview d’Abdelwahab Meddeb – 2008
«Les musulmans doivent admettre qu’une part du texte coranique est caduque, qu’elle ne correspond plus à l’esprit de notre époque. (…) L’islam doit déclarer définitivement obsolète la référence au djihad pour s’adapter aux valeurs qu’implique la liberté de conscience et de culte. (…) Une forme de lâcheté pousse les Européens et les Occidentaux à négliger cette exigence.»
Voir l‘intégralité de l’interview (d’où est extraite la citation ci-dessus)