Tribune de Jean-Pierre Filiu, professeur à Sciences Po Paris, historien, spécialiste de l’islam contemporain.
Comment expliquer la forte proportion de convertis parmi les djihadistes ?
C’est que ça n’a rien à voir avec l’islam ! On continue de regarder comme un phénomène religieux ce qui n’est qu’un phénomène politique.
Daesh est une secte. Elle frappe d’autres musulmans. Son discours totalitaire ne peut prendre que chez ceux qui n’ont aucune culture musulmane. Plus vous aurez de culture religieuse, moins vous serez susceptible d’y adhérer. On est dans le monde de l’infra-religieux, de la sous-culture. A cela il faut ajouter la dimension apocalyptique de son discours, propre aux sectes, que l’on trouve sur Internet. C’est le domaine de la superstition. Cela ne peut attirer que des enfants de Facebook et des jeux vidéo. C’est pourquoi je ne crois absolument pas à l’idée de déradicalisation. A quoi cela sert-il de dire à ces gens : « ceci n’est pas le vrai islam », alors qu’ils ont justement adhéré à la logique de ce discours ? Pour déconstruire ce discours, il faut être musulman. […]