Alors que le nombre de sans-domicile fixe a augmenté de 44% en 11 ans, les femmes et les enfants représentent une part de plus en plus importante parmi cette population, selon une étude de l’Insee publiée mercredi.
Cent douze mille personnes en France n’ont pas d’adresse. Sans logement personnel, elles dorment dans la rue, les jardins publics, les gares, les squats, ou sont hébergées dans des structures d’accueil qu’elles doivent quitter chaque matin. C’est le constat alarmant que dresse ce mercredi l’Insee dans son étude “Portrait social de la France“, qu’elle publie chaque année depuis 2001.
Pour cette population mal connue, ces enquêtes de l’institut de la statistique ont montré au fil des ans une constante augmentation de la population des SDF, laquelle a atteint 81.000 adultes en 2010, accompagnés de 31.000 enfants, soit une hausse de 44% en 11 ans. Une réalité qui doit être encore plus tragique si l’on tient compte des personnes qui ne fréquentent jamais de structures d’accueil ou qui vivent dans des communes de petite taille, qui n’ont pas été prises en compte dans ce rapport.
De plus en plus de femmes
Le principal et terrible enseignement de cette grande enquête est certainement la proportion de plus en plus importante de femmes et d’enfants vivant dans les rues. En 2012, les femmes représentaient 38% de cette population précaire. Un phénomène encore plus répandu parmi les SDF nés à l’étranger, où 40% sont accompagnés par des enfants, contre 16% pour les sans-domicile fixe nés en France.
A cette première conclusion, s’ajoute celle de la sur-représentation des étrangers parmi la population de SDF. Ils sont désormais 45.000 et plus de la moitié d’entre eux sont originaires d’un pays d’Afrique, souvent francophone. Parmi les 16.000 autres qui ne parlent pas français, deux tiers sont nés dans un pays d’Europe de l’est.
10% de sans-abris
Ils sont seulement 30%, majoritairement des familles, à bénéficier d’un hébergement dans un logement fourni par une association et un tiers occupe une place dans un centre d’hébergement collectif où l’on peut rester la journée.
Face à ces “mieux lotis”, 4 SDF sur 10 vivent dans des conditions beaucoup plus précaires, notamment dans des centres qu’ils doivent quitter chaque matin avec leurs affaires, sans être certains d’y retrouver une place le soir. Mais pour 10% des sans domicile fixe, la réalité est encore bien plus dure car ils sont sans-abri. Un chiffre qui passe même à 14% en région parisienne, en raison du nombre croissant de SDF et de la pression immobilière.
Paris et sa région sont fortement touchées par cette pauvreté. Seuls 10% des SDF vivent dans les villes de 20.000 à 200.000 habitants. L’agglomération parisienne accueille à elle seule autant de sans-domicile que l’ensemble des agglomérations de plus de 200.000 habitants.
Ressources mensuelles très faibles
Les causes de cette paupérisation sont multiples: 86% des SDF interrogés expliquent avoir connu la galère dès leur plus jeune âge en ayant vécu un événement douloureux pendant leur enfance (problème de santé grave, handicap, décès d’un parent). Un quart a dû être placé en famille d’accueil ou en foyer.
Constat encore plus alarmant, 4 SDF sur 10 n’ont jamais eu de logement personnel. Pour ceux qui en ont déjà eu un, 35% l’ont perdu à cause de difficultés familiales (séparation, décès du conjoint, violences conjugales), 30% en raison de problèmes financiers (perte d’emploi, loyers trop élevés, expulsions, etc.).
Sans surprise, dans la spirale de la pauvreté, 80% des sans-abri touchent moins de 900 euros par mois. Pis, 30% n’atteignent pas les 300 euros. Plus des trois quarts sont inactifs ou au chômage et, plus inattendu, 24% travaillent, mais occupent souvent des emplois à temps partiel, peu qualifiés et précaires. Ils sont majoritairement employés ou ouvriers, et 22% n’ont aucun contrat de travail.