Randa Kassis et Alexandre del Valle, ont publié chez Dhow éditions “Le chaos syrien” dans lequel il montrent que le chaos syrien est devenu l’épicentre d’un conflit désormais globalisé qui oppose à la fois les musulmans sunnites aux chiites, et le nationalisme à une utopie califale aux ambitions planétaires. Un extrait de l’ouvrage.
A l’évidence, l’islamisme jihadiste n’a pas surgi de nulle part. Il ne vient ni du bouddhisme, ni du judaïsme, ni de l’hindouisme, ni du christianisme. Il vient de l’islam sunnite et plus précisément d’un courant qui est hélas dominant et officiel dans les pays sunnites du Golfe. n’a jamais été dénoncé dans ses fondements théologiques et sources canoniques par ceux qui contrôlent les lieux saints (haramaïn) de l’islam, à commencer par cet étrange pays producteur de fanatisme qu’est l’Arabie saoudite.
Il est par conséquent non pas une simple « réaction » à l’injustice des « satans » Israël ou Etats-Unis, mais une «maladie qui gangrène le corps même de l’islam » (Soheib Bencheikh) depuis des siècles déjà, bien avant la création même des Etats-Unis et d’Israël, et avant la colonisation. Il ne vient donc pas «de l’extérieur», mais de l’intérieur de la Oumma, hélas peu habituée à se remettre en question et trop souvent prompte à «jeter le bébé du progressisme avec le bain de l’anticolonialisme revanchard».
Il est également évident qu’il ne sera pas détruit dans ses fondements théologiques au moyen de bombardements aériens qui tuent tant de civils innocents, quant à eux pris en otages comme en boucliers humains par ceux qui « préfèrent la mort à la vie ». D’après les nouveaux penseurs du réformisme sunnite, seules une « désacralisation » (Abou Zeit, Soheib et Ghaleb Bencheikh, etc.) et une remise en cause de certains fondements théologiques de l’islam sunnite (notamment hanbalite, hélas au pouvoir en Arabie saoudite) pourront permettre de vaincre les trancheurs de gorges jihadistes qui s’appuient (qu’on le veuille ou non) en partie sur des textes canoniques légaux jamais réformés et malheureusement toujours enseignés dans les mosquées des grands pays musulmans adeptes de l’orthodoxie sunnite.
Il ne faut jamais perdre de vue le fait que ceux-là mêmes qui feignent de combattre les terroristes islamistes aux côtés des Occidentaux, notamment le Qatar, le Koweït, les Emirats, ou l’Arabie saoudite, appliquent officiellement et distillent chez eux puis dans le monde entier une doxa islamique d’inspiration hanbalite-wahhabite-salafiste – référence des jihadistes –, qui n’est pas une hérésie, mais un courant officiel du sunnisme reconnu par les trois autres écoles sunnites, shaféisme, hanafisme et malikisme…