Valeurs actuelles” publie le témoignage d’un homme pris dans l’engrenage infernal des proches du président. Au centre de ce système, Faouzi Lamdaoui, ancien bras droit de Hollande, qui a dû démissionner de l’Élysée le 3 décembre, plaque tournante des basses manoeuvres.
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L’“affaire du chauffeur” commence en 2007. En état de choc après sa défaite à la présidentielle, le PS est à l’agonie et François Hollande s’apprête à quitter la rue de Solferino sous les huées, laissant un parti exsangue et miné par les haines. À Argenteuil, Mohamed Belaïd décide de s’investir en politique. Comme une évidence, il prend sa carte au PS. « Je n’avais jamais fait de politique auparavant. » Accueilli par la section locale, il rencontre Faouzi Lamdaoui, investi par le parti pour la campagne des législatives dans le Val-d’Oise. Après sa défaite, suivra une bataille sanglante entre le vallsiste Philippe Doucet et l’homme de main de Hollande, dans la perspective des municipales à Argenteuil, avant une paix des braves et un partage des postes dans la municipalité […]
Après le congrès de Reims, qui voit Martine Aubry succéder à François Hollande à la tête du PS, il entre au service du député de Corrèze. « En décembre 2008, c’est ma première mission pour François Hollande. Je dois le retrouver à son domicile du 6, rue Cauchy, dans le XVe arrondissement de Paris, pour aller changer sa paire de lunettes. » Lamdaoui fait les présentations : « C’est Mohamed qui va te conduire à partir d’aujourd’hui, qui va travailler pour toi. » Noël approche. « Je fais davantage connaissance avec François Hollande, toujours très courtois à mon égard. Il me demande avec bienveillance comment un musulman comme moi perçoit la fête de Noël », se souvient l’ancien chauffeur. Après les fêtes, le travail se poursuit. Il conduit son nouveau patron de plateau télé en studio de radio. Souvent tôt le matin et parfois le dimanche. Le chauffeur enchaîne les courses avec Faouzi Lamdaoui et François Hollande, mais attend toujours son contrat. « Ne t’inquiètes pas, c’est en train de se faire ! », le rassure Lamdaoui.
Avec l’homme de confiance de Hollande, est évoquée la perspective de déclarer Belaïd comme chauffeur au conseil général du Val-d’Oise, sans qu’il y mette les pieds pour autant. Son président est un proche de François Hollande. « C’est à lui que Faouzi Lamdaoui avait donné les papiers pour mon embauche. Je ne sais pas pourquoi ils ont voulu me déclarer là-bas. Lamdaoui me disait que je serais déclaré au conseil général mais que je travaillerais exclusivement pour François Hollande. »
[…] À l’exception de Charlie Hebdo, qui relate une rencontre entre le commissaire d’Argenteuil et Faouzi Lamdaoui dans ses bureaux élyséens de la rue de Marigny, l’affaire n’intéresse pas les médias français, mais retient pourtant l’attention du Sunday Times. Belaïd devient extrêmement procédurier : « Je dépose des plaintes et des mains courantes parce que je ne me laisse pas faire. C’est ma vérité. Si j’étais mythomane, je ne prendrais pas ces risques. J’irai jusqu’au bout. »Mais ses plaintes gênent en haut lieu. Un journaliste du Point, qu’il connaît, le contacte en octobre 2012 : « Il faut que tu négocies avec Lamdaoui, il te propose 10 000 euros pour que tu retires tes plaintes. Tu peux faire monter jusqu’à 15 000. — Je n’ai pas confiance en Faouzi. » Une rencontre a lieu à proximité de la rue de Solferino. Le journaliste le rassure. « Ne t’inquiète pas, il [Lamdaoui] va te donner de l’argent, il arrêtera de faire ça et, moi, je serai témoin et j’aurai l’enregistrement de la conversation avec Faouzi que je garderai en ma possession. » « Il voulait montrer qu’il tient ses engagements. Les 10 000 euros devaient correspondre à mes salaires impayés. Mais pour cela, il fallait que j’enlève la plainte », raconte l’ancien chauffeur. Lamdaoui est aussi visé par une plainte de l’ex-épouse de Belaïd, qui l’accuse d’avoir usurpé son identité dans une société, plainte à l’origine de sa démission de l’Élysée le 3 décembre. « Une de mes amies va t’appeler », achève le journaliste du Point.
L’amie, c’est Sihem Souid, une ancienne policière, aux convictions de gauche assumées, célèbre depuis son livre Omerta dans la police, et devenue chargée de mission auprès de Christiane Taubira au ministère de la Justice.
La rencontre a lieu dans un café proche de la Bastille. « Elle était vraiment stressée », se souvient Belaïd, selon qui Sihem Souid tente de le raisonner : « J’ai découvert ton histoire par les syndicats de police. Faouzi passe dans quelques jours, il faut qu’on trouve un compromis. Moi, je connais beaucoup de chefs d’État dans le monde, je me déplace partout. J’ai de l’appui, je connais très bien Jean-Marc Ayrault avec qui j’ai de très bons rapports. Ne t’inquiète pas, tu ne seras jamais embêté. » Belaïd maintient son refus. « Elle me propose aussi de l’argent et me dit : “Je vais voir Faouzi et tu me diras combien tu veux demander.” » Belaïd raconte que, pour clore leur entretien, Sihem Souid dévoile son jeu : « Tu auras tout ce que tu veux si tu enlèves ta plainte. Parce que Faouzi Lamdaoui, on a besoin de lui. Il représente notre communauté. »
« Les intermédiaires se disent prêts à monter jusqu’à 35 000 euros pour que je retire ma plainte », poursuit Belaïd
Le journaliste du point dont il est question est l'inénarrable Aziz Zemouri http://t.co/AgKHwMzNbU
— Pierre S. (@FrDesouche) December 11, 2014