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La croissance est en panne. Que faire ? Suite de notre série d’entretiens avec des économistes. Aujourd’hui, Élie Cohen, pour qui le gouvernement prend un risque en ne respectant pas ses engagements européens.

Recueilli par Marc PENNEC.

 

Croissance qui stagne, chômage persistant… Pourquoi notre économie patine-t-elle ?

Il y a un an, on tablait sur une reprise économique mondiale pour nous entraîner. Or le premier trimestre a été calamiteux aux États-Unis où la croissance en 2014 n’excédera pas 2 %. Même tendance dans les pays émergents et au Japon. Dans la zone euro, la bonne dynamique allemande marque un certain essoufflement. Enfin, il y a les problèmes propres à la France : effondrement de la construction immobilière, faiblesse des investissements des ménages et de la demande globale, manque d’incitation des entreprises à investir.

Les réformes réclamées ici et là peuvent-elles relancer la machine ?

Ces réformes structurelles – protection sociale, fluidification du marché du travail, réduction du millefeuille territorial… – créent de l’incertitude et des oppositions à court terme. Mais les effets sont positifs sur le moyen et long terme comme on l’a observé en Suède, au Canada ou en Australie.

Les Français ont-ils raison d’être aussi pessimistes ?

Franchement non. Depuis 2007, les différents gouvernements se sont appliqués à préserver le pouvoir d’achat des salariés ainsi que notre modèle social, en espérant que la reprise de la croissance viendrait régler les problèmes de la crise. Dans le même temps, en Grèce, salaires et pensions baissaient de 25 % et en Espagne de 10 %. On n’a pas non plus fait les grandes réformes qui ont produit ces résultats en Allemagne ou dans les pays nordiques. Je ne vois aucun gouvernement de gauche ou de droite dire que la priorité est de réduire les dépenses et déficits publics, en réduisant le pouvoir d’achat des Français au besoin.

Peut-on continuer comme cela ?

Non. En 2015, nous ne tiendrons aucun de nos engagements vis-à-vis des partenaires européens. L’année 2014 aura été une année pour rien. Le gouvernement dira : « Certes, nous ne tenons pas nos objectifs, mais nous avons engagé un plan de réformes structurelles ambitieux. » Ce sera une sorte de troc. Mais j’ai du mal à penser que ce scénario soit couronné de succès. Dire qu’on ne fera pas d’effort supplémentaire, de coupe dans les dépenses publiques, le pouvoir d’achat, parce qu’on n’a pas une majorité politique pour le faire, va entrer en collision avec nos engagements européens.

Donc, risque politique ?

L’année 2015 sera une année de crise politique plus qu’économique. Parce que nous sommes sur une petite tendance de reprise économique. On est en train de remonter, plus lentement qu’espéré.

Le temps des grandes croissances n’est-il pas fini ?

Les deux tiers de la croissance dans les pays développés, ce sont des gains de productivité dus au progrès technique. Et je ne crois pas qu’il y ait épuisement de ce progrès. Mais pas question de rester sans rien faire en attendant une reprise mondiale.

entreprises.ouest-france.fr

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