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De plus en plus d’adolescents indiens sont accros à Internet. Un virus qui se répand au rythme des bouleversements sociétaux que connaît le pays.

Je ne veux pas vivre dans une maison avec de telles restrictions. Utiliser Facebook n’est pas un crime. C’est une chose normale. Mais mes parents pensent que c’est grave, et c’est leur problème.

C’est pour cela que je me suicide.”

Aishwarya S. Dahiwal, étudiante à Parbhani, dans l’État du Maharashtra, s’est querellée avec ses parents, qui lui reprochaient d’abuser de Facebook.

En rage, elle est partie droit dans sa chambre, a écrit ce message et s’est pendue.

Le nombre d’Indiens accros au cyberespace ne cesse d’augmenter – et ils sont prêts à tout pour rester dans ce monde. “

Les cyberaddicts ne sont pas différents des alcooliques ou des fumeurs. Ils présentent des symptômes de manque comme de la colère ou de l’irritabilité quand ils restent déconnectés”, explique Manoj Kumar Sharma, professeur associé au National Institute of Mental Health and Neurosciences (Nimhans), à Bangalore.

Sans surprise, les adolescents sont les grandes victimes de cette addiction. Shikha, 16 ans, frêle comme un oiseau, a les yeux cernés. Cette adolescente de Delhi était pleine de vie jusqu’à ce que, il y a un an, elle tombe amoureuse d’Internet. Aujourd’hui, elle mange et dort avec son smartphone.

Au réveil, la première chose que je fais, c’est regarder mon téléphone”, raconte-t-elle. Elle refuse de sortir de sa chambre et il lui arrive de sauter un repas ou un bain. “En général, je m’endors après 2 heures du matin et je me réveille toutes les deux ou trois heures pour vérifier les messages et les mises à jour sur mon téléphone.

M. Sharma et son équipe du Nimhans ont récemment réalisé une étude auprès d’adolescents de Bangalore : 73 % des jeunes interrogés souffraient de cyberstress. Les 13-15 ans étaient accros aux jeux en ligne et les 15-17 ans aux réseaux sociaux. Au vu de la gravité de la situation, M. Sharma a fondé le centre de cyberdésintoxication Service for Healthy Use of Technology (Shut). La clinique voit sans cesse affluer de nouveaux patients.

En Inde, l’utilisation d’Internet continue de se développer avec le boom des smartphones. Ces téléphones jouent un rôle clé dans la cyberaddiction. Selon une étude réalisée par le fabricant Ericsson, la consommation de vidéos sur les mobiles ne cesse d’augmenter : 40 % des personnes interrogées regardent des vidéos tard le soir au lit, 25 % le font pendant leurs trajets quotidiens et 23 % pendant le dîner.

Le désir d’être apprécié et reconnu fait partie de la nature humaine. Or Internet est un espace où il est facile d’y parvenir puisque nous contrôlons la situation. Et cette facilité rend dépendant, résume Sanjay Mehta, fondateur de l’agence de gestion des médias sociaux Social Wavelength.

Pour sa part, M. Sharma estime que les changements sociétaux sont tout aussi responsables de cette nouvelle forme d’addiction. Avec le développement et l’urbanisation rapides, la société indienne change : importance accrue des choix individuels, éclatement de la cellule familiale, multiplication du nombre de foyers à deux revenus et augmentation de la dépendance aux technologies. “Nos emplois du temps infernaux ne nous permettent pas de soutenir constamment nos proches sur le plan émotionnel. C’est ainsi qu’Internet devient indispensable”, souligne-t-il.

Cela explique peut-être pourquoi Vaishali, 18 ans, a 300 inconnus dans sa liste d’amis d’un réseau social. “Cela flatte l’estime de soi qu’un inconnu vous demande de devenir son ami. Vous vous sentez bien.

Pour M. Sharma, du Nimhans, il est temps que l’Inde se réveille et admette que la cyberaddiction est un réel problème. Un des grands obstacles, c’est que les gens ne veulent pas reconnaître qu’ils sont dépendants parce que l’addiction est stigmatisée. Pire, paradoxalement, bon nombre d’Indiens associent l’utilisation compulsive d’Internet au progrès et au statut social, tout comme il y a quelques dizaines d’années on associait fumer et boire à la modernité.

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(Merci à Tilak)

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