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Une enseignante d’un lycée Zep de l’Essonne raconte la radicalisation progressive de ses élèves et les renoncements de l’école face à ce phénomène.

À partir de 2007-2008, de plus en plus de jeunes filles arrivaient voilées au lycée et il fallait parfois passer dix minutes de cours pour leur faire enlever ce voile qu’elles remettaient dès que je me retournais pour écrire au tableau. Beaucoup de mes collègues ont renoncé à ce combat.

Sophie n’est pas née de la dernière pluie. Cela fait vingt ans que cette professeur de philosophie enseigne dans divers établissements de l’Essonne (91). Elle a rencontré toute sorte d’élèves issus de milieux sociaux variés et de confessions diverses. Depuis une dizaine d’années, elle constate avec regret et inquiétude des changements profonds dans les comportements des jeunes qui se succèdent dans sa classe. Ce qu’elle appelle une “radicalisation” qui, combinée à des renoncements quotidiens de la part de l’Éducation nationale, finit par engendrer une situation explosive dont plus personne ne sait comment s’extirper. Extraits de son témoignage.

Le tournant, pour moi, c’est le 11 septembre 2001 : cela a délié une parole jusque-là retenue, du moins devant les enseignants. Lors du vote pour élire les délégués de classe, début octobre 2001, plusieurs bulletins de vote portaient le nom de Ben Laden. Quand je m’en suis offensée, des propos de haine ont fusé : C’est bien fait pour les Américains ! puis à notre encontre : Il faut foutre le feu à cette ville ! […]

À la même époque travaillait au lycée un surveillant de confession musulmane qui veillait à ce que les filles musulmanes ne soient pas maquillées et à ce qu’aucun élève musulman n’utilise les distributeurs de café pendant le ramadan. Il conseillait à nos élèves de ne pas se rendre en cours de philosophie, car, disait-il, on ne parle que de philosophes juifs comme Spinoza. Jamais ce surveillant ne regardait les professeurs femmes dans les yeux quand nous nous rendions dans son bureau. Tout le monde était au courant de cette attitude, mais personne n’a osé intervenir par crainte de “mettre la ville à feu et à sang”. […]

Il est devenu difficile de faire un cours sur le droit, la justice et plus encore sur la religion. Parler de la théorie de l’évolution est devenu impossible car contestée de façon violente.Chaque année, j’emmenais mes classes à la Galerie de l’évolution du jardin des Plantes, mais ils étaient de plus en plus nombreux à refuser d’y aller (les sorties scolaires sont gratuites sur le temps scolaire, donc obligatoires). […]

Le Point

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