Le directeur adjoint de l’Institut franco-allemand de Ludwigsburg, Henrik Uterwedde, analyse les germes qui ont conduit à l’éclosion du mouvement anti-islam à Dresde. Bien qu’il reconnaisse que “l’Allemagne a trop longtemps suivi une politique du ‘laissez-faire’ en matière d’immigration“, il n’en condamne pas moins le mouvement Pegida.
Certaines formations, notamment celles de la gauche bobo, ont eu une vision naïve en répétant que le pays pouvait accueillir tout le monde sans se soucier des problèmes concrets que cela pouvait provoquer. Depuis longtemps déjà, des personnes présentes sur le terrain comme le maire de Cologne tirent la sonnette d’alarme. Ma femme qui est institutrice voit des parents d’élèves faire des choses qui peuvent sembler choquantes.
Les médias et les politiciens ont raison de dénoncer Pegida et tout particulièrement les organisateurs des manifestations.
Les autorités allemandes ont interdit la manifestation en faveur de Pegida qui devait se tenir demain comme chaque semaine à Dresde. Qui sont les partisans de ce mouvement anti-islam ?
Pegida regroupe des gens qui souhaitent défendre leurs valeurs et leur mode de vie. Les manifestants qui défilent à Dresde ne sont pas des paumés mais plutôt des personnes issues de la classe moyenne, voire plus. Mais quand on lit leurs pancartes et écoute leurs slogans, on constate qu’ils souffrent d’une inculture politique criante. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si ce mouvement a seulement pris dans la capitale du Land de Saxe. Cette région est en effet traditionnellement très conservatrice et l’extrême droite y est bien implantée. Avec la chute du mur de Berlin et la disparition subite de la RDA, les habitants de la ville ont perdu tous leurs repères. Ils jugent aujourd’hui que la presse leur ment et ils se sentent trahis par tout ce qui vient “d’en haut”. Les gens de cette région n’ont jamais vécu dans une société multiculturelle et, avec la hausse de l’immigration, ils ont peur de se retrouver dans une République multicolore et cela les encourage vers les extrêmes.
Pegida va-t-il néanmoins parvenir à s’étendre dans tout le pays ?
Je ne le crois pas. Hormis le cas particulier de Dresde, Pegida est tombé à plat partout ailleurs dans le pays. Les contre-manifestations de personnes opposées à ce mouvement se multiplient dans beaucoup de grandes villes. Et j’ai été très heureusement surpris de voir fleurir de grands rassemblements à Berlin, notamment, après les attentats parisiens. Cela n’allait pas de soi que des personnes à travers toute l’Europe comprennent que ce qui se passait en France les concernait également directement. […]