Par Pascal Titeux.
Jusqu’ici tout va bien, me direz-vous, le peuple va trancher.
Mais voilà : les sondages se sont mis à dessiner une forte hausse du SD, l’amenant à des niveaux tels que ni l’alliance socialistes-verts, ni le centre-droit, ne puissent espérer gouverner. Craignant de perdre, avec leurs dernières plumes, les places qu’ils occupaient chacun leur tour dans une aimable alternance, ces partis ont décidé de se répartir les postes non plus alternativement mais simultanément, et pour toujours. En tout cas jusqu’en 2022, première date de révision de leur accord.
Stefan Löfven vient donc de revenir sur sa décision : les élections prévues pour 2015 n’auront pas lieu, et le résultat de celles de 2019 est d’avance neutralisé puisque l’entente des sortants, ou plutôt de ceux qui ne veulent pas sortir, est organisée jusqu’en 2022. La Suède aura donc la « chance » d’être la première démocratie du monde à connaître la composition de son gouvernement avant les élections, et à savoir qu’il restera en place indépendamment de leur résultat. C’est sûr que ça renouvelle le concept de démocratie, tellement même qu’il faudrait trouver un nouveau nom. […]
Bien sûr, cela n’a pas été proclamé sur fond d’hymne national par un colonel dont la garde prétorienne vient de s’emparer de la télévision : la Suède n’est pas une république bananière. C’est du moins ce que les naïfs croyaient jusqu’ici. Car si la Junte est habillée en civil, et que le parlement fait partie de la farce, c’est quand-même, très exactement, ce qu’on nomme un coup d’État. […]
(Re)voir aussi : Suède : l’union sacrée des partis « de gouvernement » contre le populisme. Un « accord exemplaire ». (Edito du Monde)