Le royaume scandinave, l’un des pays d’Europe qui compte le plus de départs de jeunes en Syrie, s’interroge sur son modèle après les attaques de ce week-end.
Pour l’imam Fatih Alev, la situation est inquiétante : «Si au début, certains sont partis dans le cadre d’un projet humanitaire, aujourd’hui la plupart y vont parce qu’ils y sont attirés par le projet politique de l’Etat islamiste.»
Ces jeunes, précise-t-il, veulent aussi fuir le Danemark: «C’est un pays qui, depuis une décennie au moins, s’est fait remarquer par un débat qui exclue les minorités et notamment les musulmans. Beaucoup de jeunes ne se sentent plus connectés. Ils n’ont aucun sentiment d’appartenance. Ils ne se sentent pas danois et refusent de se dire danois, depuis que l’identité danoise a été prise en otage par le parti du peuple danois.»
C’est un terrain idéal, dit-il, pour des recruteurs, qui «parviennent si bien à les embrigader que même les imams des mosquées danoises n’arrivent plus à argumenter avec ces jeunes une fois qu’ils sont passés entre leurs mains». […] Beaucoup d’entre eux, remarque-t-il, ne trouvent pas leur place au sein de la société danoise : «Ils portent encore les valises de leurs parents, pleine des conflits qui ne se sont pas résolus. Ils veulent une revanche.»
Internet n’aide pas: «Ils passent leur temps devant leurs écrans. Si physiquement, ils vivent au Danemark, mentalement ils sont au Moyen-Orient.»
Au Danemark, les apprentis jihadistes de retour au pays sont la plupart du temps laissés en liberté : «Tant que nous n’avons pas de preuves indiquant que ceux qui reviennent ont participé à des activités illégales, nous ne pouvons pas les poursuivre en justice», explique Jørgen Ilum, commissaire principal à Aarhus.
Le gouvernement envisage désormais le retrait des passeports et l’expulsion pour les citoyens non-Danois. Les conservateurs et populistes veulent aller encore plus loin et réclament des peines de prison. Magnus Ranstorp met en garde: «On ne peut pas faire seulement de la répression. Il faut mettre en place des mesures de prévention. Ce n’est pas être soft. C’est être intelligent. On ne règle pas le problème en envoyant tout le monde en prison.» Il appelle donc les autorités danoises à «garder la tête froide».
Libération