En 2015, c’est une certitude, la technologie continuera d’avoir un impact sur les villes de demain. Mais l’inverse est également vrai ! C’est ce qu’explique Mathieu Lefèvre, directeur exécutif de New Cities Foundation, plateforme de réflexion sur la ville de demain. Selon lui, l’année 2015 devrait même être marquée par l’ère de la “post smart city“: un nouveau modèle qui accorderait beaucoup plus d’importance à l’humain. On parlerait alors de “sensitive city“…
De quoi sera faite la ville de demain ? Il y a d’abord les certitudes. Fin 2015, la population urbaine mondiale aura crû de près de 2%, soit 70 millions de citadins supplémentaires – l’équivalent de la France. Un tel changement démographique annonce de profondes mutations culturelles, sociales, économiques et environnementales.
A cette première certitude s’ajoute une seconde plus tangible: l’avancée technologique. Il suffit de rappeler que le premier iPhone est sorti il y a moins de 8 ans, en 2007. De l’intelligence artificielle à l’impression 3D, en passant par les objets connectés et la biotechnologie, les technologies à haut potentiel disruptif abondent et auront un impact sur notre quotidien dont on ne saurait mesurer l’ampleur.
La smart city est née à la croisée de ces deux phénomènes. Si l’on peut prédire sans trop prendre de risques que la technologie continuera d’avoir un impact sur les villes de demain, l’inverse est également vrai : la ville a un effet important sur la technologie. Il ne peut exister d’Uber, d’Airbnb ou de Velib’ sans ville dense et dynamique. De quoi sera donc faite la ville de demain? Aventurons-nous dans quelques prédictions pour 2015.
En 2015, la gouvernance urbaine sera réinventée
Si la technologie de la ville connectée est en plein essor, c’est la gouvernance urbaine qui accuse un retard. Les mairies ont du mal à maîtriser et tirer parti de technologies comme celles liées aux données. En 2015, on verra le secteur public rattraper son retard et se doter de ressources pour mieux piloter les efforts et coordonner les initiatives privées et publiques.
Cette réinvention se fera aussi grâce aux citoyens, qui joueront un rôle prépondérant dans un monde où le pouvoir est plus diffus et décentralisé, en partie grâce à des avancées telles que les réseaux sociaux. Loin des consultations purement cosmétiques de ces dernières années, la participation citoyenne jouera pleinement son rôle.
Les sources d’inspiration ne manquent pas: le réseau de mobilisation Nossas Cidades au Brésil, l’application new-yorkaise PublicStuff (qui permet aux citoyens de signaler des problèmes aux services publics) ou le succès électoral du “Common Man Party“ à Delhi ne constituent que quelques exemples.
En 2015, la course à l’innovation urbaine s’accélérera
Londres, Singapour, New York, Amsterdam ou Barcelone sont bien parties pour devenir les épicentres de l’innovation urbaine – la Silicon Valley de l’urbain – mais la course ne fait que commencer. Des accélérateurs et incubateurs d’innovations urbaines comme Grind Cities, en Afrique du Sud, ou Tumml, à San Francisco, émergent un peu partout, soutenus par des villes cherchant à favoriser l’émergence d’un tissu entrepreneurial dynamique.
En 2015, les villes seront en première ligne sur le climat
Responsables de plus de 70% des émissions de gaz à effet de serre, les villes sont les mieux placées pour relever le défi climatique. Que ce soit à travers des réseaux dédiés au développement durable tels le C40, ICLEI ou les 100 Resilient Cities, la ville s’imposera au cœur de l’action concrète lors de la COP21, la grande conférence sur le climat qui aura lieu à Paris en décembre 2015.
En 2015, la smart city deviendra enfin rentable
Les expérimentations menées depuis des années sous l’étendard de la smart city ont montré que l’on pouvait mieux gérer l’eau, l’énergie, les déchets ou encore la circulation. En France, les projets sont nombreux. Si les acteurs privés ont encore du mal à trouver leur compte, en 2015, des solutions plus ciblées en rupture avec les méga-projets du passé connaîtront enfin le succès commercial. Après des années de tâtonnement, le modèle économique de la smart city commence à être mûr.
En 2015, nous passerons à l’après smart city
Le concept de smart city a nourri l’imaginaire d’un grand nombre d’architectes, urbanistes, penseurs, entrepreneurs, et ingénieurs. Il n’en reste pas moins un rêve technologique où l’humain a trop peu de place. Tapez donc “smart city” dans votre moteur de recherche et regardez les images : l’expérience est édifiante.
La smart city est ancrée dans l’imaginaire collectif comme un insaisissable concept futuriste piloté par de grandes entreprises cherchant à capter les investissements municipaux, voire à une ville où les données produites servent à des fins principalement commerciales.
En combinant les grands enjeux urbains et technologiques, le modèle de la smart city a ouvert une voie. Il nous appartient désormais de forger un nouveau modèle qui replacera la personne au centre de ce siècle des villes. Serions-nous à l’aube de la “sensitive city” ?