Dans les Centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous), les dossiers de demandes de bourses étudiantes pour la rentrée 2015 s’empilent depuis le mois de janvier, et la patience s’érode.
Démunis, les employés des services chargés des bourses se trouvent dans l’incapacité d’instruire la plupart des demandes qui leur sont adressées. Alexandre Leroy, président de la Fédération des associations générales étudiantes (FAGE), pointe du doigt la responsabilité du gouvernement qui freinerait les procédures « en ne fournissant pas les informations nécessaires pour les traiter ».
La raison ? Le ministère de l’enseignement supérieur et le ministère de l’économie et des finances sont en train de réfléchir à de nouvelles modalités de calcul pour l’attribution de ces bourses sur critères sociaux. Une réforme qui permettrait de faire des économies budgétaires et dont l’arbitrage est en cours depuis plusieurs mois déjà.
« Aujourd’hui, les barèmes prennent en compte le revenu brut global des familles, explique Alexandre Leroy. Mais Bercy aimerait bien voir cette modalité évoluer pour que ne soit considéré que le revenu fiscal de référence. Un revenu qui ne contient pas uniquement les ressources du salaire mais aussi le patrimoine financier et immobilier. Or, dans 70 % des familles, le revenu fiscal de référence est plus élevé que le revenu brut global. »
Une proposition écartée en 2013
Si cette modification est actée, 30 000 à 40 000 étudiants sortiraient du système des aides sociales du Crous, disqualifiés par ce nouveau mode de calcul. Une solution que le ministère de l’enseignement supérieur souhaite éviter, pour ne pas avoir à subir une mobilisation étudiante à la rentrée. Si dans l’entourage de Najat Vallaud-Belkacem, on ne conteste pas que des discussions interministérielles sont en cours, on assure qu’« une modification des critères d’attribution ne changerait rien pour 90 % des étudiants boursiers ».
Cette proposition n’est pas nouvelle. Elle a déjà été formulée par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), et l’Inspection générale de l’éducation nationale (IGEN) dans un rapport commun sur la vie étudiante datant de décembre 2013. Une solution que le gouvernement n’avait pas retenue à l’époque.
« Situation de barrage administratif »
Au ministère de l’enseignement supérieur, on réfute aussi tout blocage des dossiers dans les Crous qui « continuent de les instruire sur la base des critères de l’année précédente et d’envoyer des notifications conditionnelles aux étudiants », leur permettant de savoir s’ils pourront bénéficier des aides ou non, avant d’en avoir la confirmation par une notification définitive au cours de l’été.
« A vrai dire, selon les consignes du ministère, seul les dossiers des étudiants dont le revenu brut global et le revenu fiscal de référence sont équivalents peuvent être traités aujourd’hui, ce qui représente moins de 10 % des cas, affirme Alexandre Leroy. La majorité des vingt-huit Crous de France sont concernés par cette situation de barrage administratif. » Contacté par Le Monde, le Centre national des œuvres universitaires et scolaires (Cnous) qui chapeaute les Crous, s’est refusé à tout commentaire.