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Extraits d’une chronique de Marcela Iacub intitulée : “FN, ce qu’on ne vous dit pas”. Marcela Iacub est une juriste franco-argentine issue d’une famille originaire de Biélorussie et d’Ukraine. Elle est chercheuse au CNRS.
Depuis que Marine Le Pen a pris les rênes du Front national, on a beaucoup de mal à lier ce parti à l’univers composite du fascisme. On préfère qualifier son projet politique de «populisme» ou de «populisme national», l’expurgeant ainsi des pires vices des régimes et autres politiques criminelles du XXe siècle. […] Certes, on ne cesse d’invoquer d’autres projets inquiétants : l’instauration de la peine de mort, l’intolérance par rapport à la religion musulmane, la fermeture des frontières à l’immigration. Et pourtant, aussi affreuses et désastreuses soient-elles, ces mesures ne compromettent en rien l’idée démocratique. Il en est cependant une, au cœur du projet du parti, et dont on parle, hélas, beaucoup moins, qui la compromet franchement. Il s’agit de la «priorité nationale». C’est le nouveau nom que le Front a donné pour institutionnaliser les inégalités entre les habitants d’un même pays et, a fortiori, entre les citoyens.

Les personnes ayant la nationalité française devraient, ainsi, être prioritaires pour les emplois, alors que les étrangers ne devraient pas jouir de prestations sociales. Et le Front prône l’abolition du droit du sol, au bénéfice du droit du sang.

En mettant en place une telle politique de la nationalité, on réintégrerait certaines règles déjà accordées sous le régime du maréchal Pétain. Des millions de personnes devenues françaises en vertu du droit du sol, mais qualifiées d’indésirables parce qu’issues de l’immigration, viendraient composer cette armée de citoyens de seconde zone ou de colonisés de l’intérieur. D’une part, il y aurait une caste de Français de «souche» ; de l’autre, celle composée d’étrangers et de personnes à qui l’on aurait retiré la nationalité et tous les privilèges attachés à ce statut.

Et si ces étrangers, réels ou de papier (car c’est ainsi que l’on pourrait appeler les dénationalisés nés en France), ne sont pas contents, ils n’ont qu’à quitter le pays, même s’ils n’ont aucun endroit où aller. Ce projet suffit pour compromettre le caractère démocratique du parti de la famille Le Pen. Il n’est pas nécessaire d’invoquer ses théories paranoïaques par rapport à l’islam, car elles représenteront l’un des arguments invoqués pour refonder le droit de la nationalité. Les musulmans ne sont-ils pas issus d’une immigration antinationale, instaurée par les affreux partis du système ? […] Libération

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