La semaine dernière, Manuel Valls présentait un plan de lutte contre le racisme et l’antisémitisme. A-t-on seulement oublié que d’autres formes de discriminations prennent une autre ampleur de l’autre côté de la Méditerranée, ici aussi. Entre arabes et noirs, la couleur a son importance pour certains.
« On est France depuis plusieurs générations. Et où en est-on ? On se plaint du racisme et ne l’est-on pas nous même ? » S’interroge Kery James dans sa chanson Constat amer.
Un vendredi à la mosquée. Lakhdar, barbe poivre et sel, égrène son chapelet. Il psalmodie avec ferveur quelques versets. Samba se tient à distance acceptable. Regard empli de sagesse, barbichette blanche, mains ouvertes, il crachote des bénédictions. On lance l’appel à la prière. Les hommes sont en communion. L’imam les y invite : « Soignez les rangs lorsque vous vous présentez devant Allah ! Resserrez les rangs ! Ne laissez pas d’espace entre vous si vous ne voulez pas que le sheitan se balade entre vous, quand vous êtes dans l’adoration du Miséricordieux ». Un vœu pieux. Effrontés, Samba et Lakhdar laisseront le diable danser la tecktonik sur le tapis de leurs turpitudes.
Le cœur endolori Samba n’oublie pas et ne pardonne rien du racisme qu’il a subi dans le Nord de l’Afrique en quittant son village près de Kayes (Mali). Samba ressasse cette humiliation de policiers marocains qui lui ont pissé dessus sans lui faire croire qu’il pleut. Lakhdar lui a le seum contre Babacar l’acolyte délinquant de son fils Medhi qui croupit en taule par « sa faute ». Il lui avait pourtant dit plusieurs fois : « Fils ne reste pas avec ces gens. Ils ne sont pas comme nous. Ils sont maudits. Si tu voyais à quoi ils sont réduits au bled ! C’est la honte d’être vu avec eux ». Pour Samba ils sont tous pareils ! Il repense encore à son neveu. Un brûleur de frontière niais qui croit encore à un rêve européen dans les pays de l’euroscepticisme. Salif est en Tunisie et lui a raconté qu’il a vécu planqué les ratonnades contre des noirs parce qu’un arbitre « khal »* a favorisé la Guinée dans un match de Coupe d’Afrique des nations. Lakhdar tremble à l’idée que sa fille ramène un noir, un « “abd »* en guise de futur époux. Il a peur de mourir étouffé par le regard et les moqueries des autres. L’imam rappelle : « O les hommes ! Celui que vous adorez est un, et votre père est un. Pas de supériorité d’un Arabe sur un non-Arabe, ni d’un non-Arabe sur un Arabe, ni d’un blanc sur un noir, ni d’un noir sur un blanc. La seule supériorité qui compte [auprès de Dieu] est celle de la piété. Ai-je transmis le message ? » En vain les cœurs sont déjà noircis.
(…) Bondy Blog