Ce mercredi sort “La marche des lemmings”, le livre choc de Serge Federbusch qui explique comment le pouvoir socialiste a manipulé l’opinion au moment des attentats de janvier pour escamoter ses faillites et sa responsabilité. Et comment la manifestation monstre du 11 janvier résulte elle aussi d’un conditionnement pour dévier l’émotion populaire vers le “pas d’amalgame” en niant l’évidence des progrès du fondamentalisme musulman en France.
Atlantico : La manipulation du siècle, vous n’y allez pas un peu fort ?
Serge Federbusch : C’est vrai, ce siècle n’a que quinze ans comme dirait Victor Hugo. Pourtant, nous avons assisté à un cas d’école de manipulation qui restera dans l’Histoire.
Atlantico : Laquelle précisément ?
A toutes les étapes de cette affaire, l’opinion a été trompée. D’abord, il y a eu un dysfonctionnement majeur des services de renseignement. Savez-vous qu’il a fallu attendre le 3 avril dernier pour qu’enfin un journal national, Le Monde pour ne pas le citer, indique que le ministère de l’Intérieur avait intoxiqué la presse en lui faisant croire que la surveillance des frères Kouachi avait été interrompue à la demande de la “Commission nationale de contrôle des interruptions de sécurité”. En réalité, cette instance composée majoritairement de hauts magistrats a publié le 12 janvier, au lendemain donc de la grande manifestation, un communiqué pour expliquer “qu’à aucun moment (elle) n’avait manifesté d’opposition …
les affirmations contraires sont au mieux une inexactitude, au pire une manipulation”. Mesurez-vous l’ampleur du scandale ? Une commission officielle parle de manipulation, forcément du ministère de l’Intérieur, dans une affaire qui ébranle la république. Et ce communiqué, qui aurait dû exploser comme un bombe, a été soufflé par la déflagration de la manifestation des Charlie !
Tout est à l’avenant dans cette affaire. La protection du siège de Charlie était indigente, largement pour faire des économies de bout de chandelle alors que, deux semaines plus tôt, Valls disait dans un discours officiel que le péril djihadiste n’avait jamais été aussi élevé en France. La cavale des Kouachi fut extravagante et témoigne d’une faillite complète des services de police. Un demi-heure de fusillade au centre de Paris, douze morts, des véhicules de police qui reculent et des tueurs qui s’évaporent porte de Pantin après avoir braqué une autre voiture ! Si on n’avait pas eu affaire à un commando suicide sans plan de fuite ou de planque, il aurait pu disparaître dans la nature et, aujourd’hui, pas un jour ne se passerait sans que l’UMP et le FN ne réclament la démission de Hollande. Tout cela est expliqué dans le détail dans mon livre.
Atlantico : Et l’esprit du 11 janvier, la grande marche… des manipulations aussi ?
L’émotion populaire était indéniable. Mais tout a été orchestré pour que les responsabilités du pouvoir ne soient pas mises en cause et pour protéger les musulmans, électorat cher au pouvoir, d’un accès de courroux populaire au nom du “pas d’amalgame”. La désopilante marche des dirigeants, présentée sur le moment comme prenant la tête du cortège et qui en réalité a eu lieu en vase clos, les transports gratuits, l’appel à manifester de tous les médias sans exception ou presque … et surtout la date choisie.(…)
Atlantico : Cela ne remet pas forcément en cause le souci de ne pas faire d’amalgame. Vous ne croyez pas à la thèse de la séparation entre islamistes et musulmans ?
C’est une distinction destinée à ne pas effrayer l’opinion. Il y a une différence de degré et pas de nature entre les deux. Le Coran est un peu une auberge espagnole avec des passages plus ou moins agressifs et on peut y trouver ce qu’on y cherche. Diriez-vous que le régime saoudien, qui décapite hardiment et où la femme est discriminée, incarne un islam modéré ? Pourtant, il s’oppose à Al-Qaïda. La situation est beaucoup plus complexe que le monde binaire pour bobos-bisounours décrit par Joffrin à longueur d’éditoriaux dans Libération. La réalité est que le fondamentalisme fait des progrès constants en France et que la classe dirigeante nie l’évidence par lâcheté et/ou clientélisme. Ecoutons plutôt le député socialiste Malek Boutih, qui nous appelle à l’intransigeance face à cette peste, plutôt que les prêches du vivre-ensemble.
Atlantico : Vous semblez dire dans votre livre qu’au fond les frères Kouachi ont gagné, que le pouvoir recule face au fondamentalisme ?
Depuis le 11 janvier, il y a eu au moins dix cas d’événements annulés, d’expositions amputées, de festivals écourtés par peur d’attentats. Quand il y a cinq jours Luz vous explique qu’il n’a plus envie de caricaturer Mahomet, vous sentez comme une parfum de dhimmicratie dans l’air…
Atlantico : Et les médias, vous ne les épargnez pas ?
Certes non… Ils ont pour la plupart servi de courroie de transmission à cette gigantesque manipulation. Une semaine après les attentats, certains vous expliquaient que les vrais responsables s’appelaient Eric Zemmour et Renaud Camus ! (…)
Atlantico : Et l’avenir ?
Franchement, il est sombre. Le système politique et médiatique fera tout pour éviter d’affronter le problème du fondamentalisme musulman en face. Avez-vous remarqué que les voiles prolifèrent dans les rues depuis janvier ? Salafistes, wahhabistes et autres ultra conservateurs semblent prendre le contrôle de la communauté. Les musulmans français cherchent de plus en plus à affirmer leur identité par une pratique religieuse régressive. C’est un retour en arrière. Dans ma jeunesse, j’ai eu plusieurs amies et quelques petites amies musulmanes qui adoraient le whisky, le rouge à lèvres et les slows langoureux. Sont-ce leurs filles qui portent le voile aujourd’hui ? J’ai peine à le croire et à comprendre comment nous sommes arrivés à ce désastre.
Atlantico
Bonus : Livre totalement en adéquation avec ce que déclaraient les intervenants sur les ondes de Méridien Zéro dès le 23 janvier.