Le livre d’Emmanuel Todd, Qui est Charlie? Sociologie d’une crise religieuse, a suscité de nombreuses controverses. Todd a cartographié les tailles des manifestations du 10 et 11 janvier en réaction à l’attentat de Charlie Hebdo et du supermarché Hyper Cacher. Il a ensuite analysé les corrélations entre la participation aux manifestations et des paramètres sociologiques et religieux pour les différentes villes françaises.
Il en a tiré une interprétation à contre-courant des idées reçues: cette manifestation massive ne serait pas l’expression de l’esprit des Lumières, de la défense de la République et de la liberté d’expression ou une dénonciation de l’antisémitisme. Elle marquerait au contraire l’émergence d’un nouveau bloc hégémonique qu’il nomme MAZ (classes Moyennes, personnes Âgées, catholiques Zombies) qui entend se dresser contre l’islam, religion portée par un groupe minoritaire et défavorisé. […]
Les villes classées comme catholiques ont un taux de manifestants plus élevé que les autres: 11,2 % en moyenne contre 7,7%. Cet écart de moyenne est statistiquement significatif, même s’il est faible. […]
Il existe une forte corrélation positive et significative du taux de manifestants avec la part que représentent les diplômés de l’enseignement supérieur court ou long dans la population non scolarisée de plus de 15 ans des aires urbaines. […]
Une autre corrélation est aussi significative et assez forte mais en sens inverse, celle avec le taux de chômage de l’aire urbaine. Plus le taux de chômage est élevé dans l’aire urbaine, plus le taux de manifestants est bas. […]
Enfin, la corrélation du taux de manifestants avec le score du Front national aux européennes de 2014 est inverse et très forte. C’est même la plus forte constatée jusqu’à présent. Le vote FN est bien associé à une plus faible participation aux manifestations. Il est aussi significativement corrélé avec la part des ouvriers dans l’aire urbaine. […]
Slate