Dans l’Éducation nationale, les difficultés ne se concentrent pas que sur le collège. Alors que la réforme de Najat Vallaud-Belkacem a donné lieu à d’âpres débats ces dernières semaines, Sophie L., maitresse remplaçante dans le primaire depuis septembre, dépeint une situation désastreuse dans les deux écoles où elle travaille. La plupart des élèves de CM2 n’ont pas le niveau pour entrer au collège… Indiscipline, niveau accablant, elle envisage même de changer de métier.
Ma classe de CM2 est extrêmement dissipée et même les punitions n’y font pas grand-chose. Plus grave encore, ils les contestent sans cesse. Si je punis deux élèves noirs dans la même journée, j’ai la garantie de me faire traiter de raciste.
Face à un élève qui me dit que “son père va venir m’égorger” lorsque je le punis, je suis complètement démunie. Lorsque j’avais l’âge d’être en primaire, je n’étais pas dans une zone spécialement favorisée ni défavorisée, pourtant, les paroles de la maîtresse était toujours bus avec une raisonnable attention par l’ensemble de la classe. Ce n’est pas faux de dire que les temps ont changé à l’école.
Je suis maîtresse d’école pour des CM2 de ZEP et pour des CE2 dans une zone de plus en plus difficile : je vis un enfer depuis le premier jour. Je n’ai pas été suffisamment préparée à ce qui m’attendait. Ma formation était trop théorique et la réalité du terrain est ignorée par les formateurs. […] Le lundi, j’ai donc une classe de CM2 dans une école primaire difficile du 94. Comme je ne suis “que” la maîtresse remplaçante, je n’ai, selon eux, aucune légitimité à leur enseigner quoique ce soit. Ils prennent ma journée de cours pour une continuité de leur week-end. Du côté des parents, c’est pareil. Pour eux, je ne suis pas importante puisque je ne suis pas “la vraie maîtresse”. […] Je ne peux pas réellement leur enseigner le programme de CM2, leur niveau est identique vois en dessous de celui de mes CE2. Les lacunes se sont accumulées et sont aujourd’hui presque insurmontables. À part trois ou quatre élèves, sur un peu plus d’une vingtaine, aucun n’a le niveau pour entrer au collège. […] Nouvel Obs