Excédés, des riverains de la cour Delecroix, rue de Rivoli, projetaient de lancer une campagne publicitaire contre les Roms qui squattent les lieux depuis deux ans. Ce vendredi, ils ont finalement renoncé à leur projet. L’émotion suscitée a suffi à « attirer l’attention » sur la situation qu’ils dénoncent. C’est, disent-ils, simplement ce qu’ils voulaient.
« J’ai des coups de fil anonymes, je passe pour un facho réactionnaire des années 30… Mais moi je ne suis pas politique, je suis éloigné des extrêmes et ne cherche pas à attirer ceux qui les représentent. »
Ce vendredi midi, le porte-parole des riverains excédés de la rue de Rivoli, et qui projetaient de lancer une campagne de pub anti-Roms en 4 par 3, a renoncé. « Ici, prochainement, Rom’s Village », disent les affiches. […]
Le Fivois annule l’opération, mais met de côté les « quelques » bâches qu’il s’apprêtait à déployer dans le quartier. « Je dénonce trois choses : la situation sanitaire de ce squat, la lenteur de la justice (l’avis d’expulsion date de décembre et les Roms sont toujours là), et le fait que personne ne bouge. »
Cinq familles (une trentaine de personnes) vivent cour Delecroix, dont une dizaine d’enfants, scolarisés à Mons. Trois maisonnettes sont occupées, une famille par niveau. L’entrée de la cour n’est pas reluisante. Des petits boxes débordent de déchets en tout genre, vieux matelas, vêtements, excréments… […]
L’avis d’expulsion date de décembre. Non exécuté, ce que dénoncent les riverains. « Oui, il y a ce contexte et j’entends les voisins excédés, répond Sébastien Duhem, président du conseil de quartier de Fives. Mais nous avons la volonté de ne pas rompre la scolarité des enfants. […]
« Je suis atterré… Une telle opération est discriminatoire. Elle devrait tomber sous le coup de la loi, puisqu’elle ne tombe plus sous le coup du bon sens », dénonce hier Bertrand Verfaillie, du collectif de solidarité Rom lillois. La méthode d’expression choisie par des riverains de la rue de Rivoli a choqué les associations. La Ligue des droits de l’Homme, sitôt l’intention déclarée, a consulté ses services juridiques à Paris. « Pour aucune catégorie de migrants ou de populations, ajoute Bertrand Verfaillie, on n’oserait pointer l’origine ethnique. » Patrick Vigneau, directeur du dispositif AREAS de la Sauvegarde du Nord (accompagnement social des gens du voyage et des Roms), renchérit : « Si on disait le quart sur la communauté maghrébine ou juive, ça ne passerait pas. Mais les Roms sont isolés. »
« La réaction des riverains est démesurée, juge Laurent Guyot, adjoint PS à l’inclusion sociale. Ce sont des êtres humains qui ont droit au respect. Et droit à un logement. Il n’y aura pas d’expulsion sans solution. […]
« Ce ne sont pas des barbares qui cassent tout et mettent le souk. Les riverains, eux, sont agressifs », dénonce Patrick Vigneau. Si les voisins ont finalement renoncé, la mésaventure rappelle le tabassage d’un Rom à Villeneuve, la boue répandue par le maire à Hallennes-les-Haubourdin. « C’est inquiétant, une digue est tombée », juge le patron de l’AREAS. [..]
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