Les féministes accusées de ne pas savoir intégrer les minorités http://t.co/DOfHhmMx9q #feminism pic.twitter.com/KwD2odOubf
— Madame Figaro (@Madamefigaro) June 10, 2015
Le voile sera-t-il à l’origine d’une fracture définitive chez les féministes ? La démission de toute l’antenne lyonnaise d’Osez le féminisme ! s’inscrit dans une remise en cause des partis pris d’un féminisme souvent accusé d’être pensé par des femmes blanches bourgeoises, gênées par la question du foulard et insensibles à la question du racisme.
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Quels sont donc les combats sous-représentés ? Du côté des femmes de culture musulmane, c’est la question du voile qui a creusé l’abîme entre elles et Osez le féminisme ! L’association est accusée de rester muette face aux actes islamophobes, alors que près de 80 % de ces actes sont commis contre des femmes, selon le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF). Elle est aussi accusée de ne pas s’élever contre l’interdiction pour les mères voilées de faire partie des excursions scolaires, contre laquelle se bat l’association Maman toutes égales. Dans son livre Des voix derrière le voile, la journaliste Faïza Zerouala a souhaité donner la parole à ces femmes voilées dont on parle beaucoup mais qu’on entend rarement. Pour elles, le féminisme dans son sens large s’apparente surtout à un ennemi stigmatisant. « Elles ne peuvent pas se retrouver dans un mouvement qui, majoritairement, les considère comme des victimes. Même quand elles font l’objet d’agressions, elles se disent que les féministes ne viendront pas les défendre. »
(…) Les femmes noires se sentent aussi oubliées du « féminisme mainstream », auquel peu d’entre elles adhèrent. « Je regarde OLF et je ne vois que des blanches, constate Rokhaya Diallo. Quand on est une organisation qui vise à promouvoir l’égalité hommes-femmes, on doit mettre en place des dispositifs pour ouvrir cette organisation à tout le monde. »
(….) Les afroféministes ne veulent pas gommer leur identité noire sous la bannière du féminisme universel, mais au contraire la revendiquer comme un vecteur primordial de leur identité. Le collectif MWASI déclare se battre pour un féminisme qui rende la femme « fière de sa peau (noire, métisse…) et de son identité », pour que les femmes puissent « croire en leur propre puissance, en leurs capacités en tant qu’afrodescendantes ». Leur programme figure sur leur page Facebook (elles n’ont pas souhaité nous parler) : « Marquer notre attachement à l’Afrique à son histoire », « ne jamais oublier les épisodes de la colonisation, de l’esclavage et ainsi que tous les autres moments de l’histoire où les peuples afros ont été exploités »…
La fragmentation est dans l’air du temps. Chacun veut parler de ce qu’il est, de son identité, et n’entend plus transiger, au risque de se refermer sur lui-même. Même les tentatives pour réunir tous les mouvements à travers le « féminisme intersectionnel », un nouveau concept né aux États-Unis dans les années 1990 semblent biaisées. Officiellement, il s’agit de croiser les problématiques de genre, de race et de culture, au-delà de la seule classe sociale, en prônant l’ouverture. Une sorte de féminisme commun, où chaque particularité peut s’exprimer. En théorie. Le 14 juin aura lieu une journée de l’intersectionnalité, organisée notamment par les Assiégé-e-s, journée durant laquelle tous les ateliers seront « en non mixité racisé(e)s ». Comprendre : pas pour les Blancs.
Madame Le Figaro