Tribune de Cécile Daumas, rédactrice en chef adjointe du service idées à Libération.
On pourrait faire librement le choix de la prostitution mais pas celui du voile ?
Cet hiver, des élus UMP auraient bien voulu interdire le port du voile à l’université. Au nom de la laïcité, pour libérer des femmes, pensent-ils, du joug religieux. Ce vendredi, des député(e) s PS aimeraient durcir la législation sur la prostitution : pénaliser le client pour lutter contre les réseaux mafieux, instaurer une société où «les corps des femmes et des hommes ne peuvent ni s’acheter ni se vendre.» Et les femmes voilées, que disent-elles ? Et les prostituées ? Qui, dans ce débat passionnel, où la notion de liberté est à chaque fois invoquée, les écoute réellement ? […]
Aliénées ou manipulées, elles ne pourraient consentir librement à ces choix de vie singuliers pour la société française. Au regard des millions de femmes qui ne portent pas le voile ni ne se prostituent, cette fixation sur la religion et le sexe peut sembler secondaire, voire irritant. Elle traverse cependant un mot d’ordre fondateur du féminisme : le droit des femmes à disposer librement de leur corps. Mais pourquoi ce droit serait-il à géométrie variable ? Pourquoi, plus de 60 ans après la parution du Deuxième sexe de Simone de Beauvoir, prête-t-il toujours à polémique et discussion ?
Bien sûr, il faut lutter contre les réseaux de prostitution, il faut faire barrage aux fanatismes religieux qui en premier lieu s’en prennent au corps féminin.