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Une vendeuse de fruits et légumes a écopé d’une étonnante amende : elle criait trop fort sur un marché amiénois.

Bien connue des habitués des marchés du Beffroi, de Longueau et du Colvert sous le nom de “Manue”, Emmanuelle Favrel, la quarantaine rugissante, n’en revient toujours pas, quasiment un an après les faits. Le 19 juillet 2014, cette vendeuse de fruits et légumes, à son compte depuis 1990, est sur le marché ouvert du Beffroi dans le centre-ville d’Amiens.

Deux amendes

Comme d’habitude, elle se fait entendre en vantant ses produits à la criée, un peu comme le ferait une poissonnière. Vers 11h20, la police municipale patrouille et voit rouge en lui infligeant deux procès-verbaux : l’un pour dépassement de surface, ses étals empiétant de deux mètres sur le domaine public et l’autre – plus étonnant – pour avoir troublé “l’ordre du marché par des cris afin d’annoncer la nature et le prix de ses produits, pour attirer des clients”, peut-on lire sur l’ordonnance pénale. Des faits réprimés par l’article R.610-5 du code pénal.

Il y a quelques semaines, “Manue” a reçu les deux amendes, incluant les frais de procédure : 122 euros au total, moins 20 % de remise si elle payait immédiatement. “J’ai payé pour ne pas avoir de problèmes dans mon travail mais je ne comprends toujours pas pourquoi on m’a sanctionnée. Depuis l’âge de 12 ans, je fais les marchés, je n’avais jamais vu ça. Un marché est un endroit bruyant où il faut attirer le client. C’est le jeu de la concurrence. Quand les politiques sont en campagne électorale, eux aussi viennent crier au marché ! Ils ne prennent pas d’amende pour autant.”

Elever la voix fait partie du jeu

Si la maraîchère reconnaît avoir “la voix qui porte”, elle réfute le trouble à l’ordre public. “J’ai été surprise. Mes clients aussi, je les ai dissuadés de signer une pétition de soutien.”

C’est le cas d’Alain scandalisé : “On sait bien que sur un marché, les vendeurs ont tendance à élever la voix, ça fait partie du jeu. La Ville veut peut-être faire de ce marché un marché luxueux…” Coïncidence ou pas, il y a quelques mois, le maire-adjoint chargé du commerce Renaud Deschamps avait fait part de sa volonté de réformer le marché ouvert du Beffroi en voulant réduire le nombre de vendeurs de bazar pour les remplacer par des produits plus haut de gamme et en augmentant la tarification du mètre pour les commerçants non sédentaires. Annonces qui avaient provoqué une levée de bouclier chez ces derniers. Sur le marché du Beffroi, la mésaventure de “Manue” n’a pas échappé aux autres vendeuses de fruits et légumes. “Elle a une grosse voix, à force ça peut agacer”, estime Aïcha, campée au milieu de ses melons (Fdesouche : sic). Pas vraiment solidaire, elle ajoute : “On peut vendre ses produits sans hurler ! Mais elle n’est pas la seule.” Du côté de la Ville, Clément Stengel l’adjoint chargé de la sécurité, indique qu’”il n’y a pas de consignes particulières” pour verbaliser ce type d’infraction. “Ce n’est pas l’esprit de la maison. Mais quand ça arrive, on applique la loi.”

Le courrier picard

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