Une chrétienne [non catholique] de banlieue publie une lettre ouverte au journaliste Christophe Hondelatte.
Il est précisé que cet article n’engage en rien l’Express.
Vous, vous allez sur le marché, vous choisissez 2 légumes, vous faites la queue et on vous sert. Moi non. On prend toutes les femmes voilées qui se présentent, ma mère s’est vue attendre plus de 20minutes pour ne pas être servie du tout, elle est partie, au final. Même chose pour une dame que je connais, 80 ans passés, pas de voile sur ses cheveux blancs, pas de service sur le marché.
Avant toute chose, je tiens à vous préciser que je vous aime bien Mr Hondelatte. Non, vraiment. J’ai découvert en vous suivant sur Twitter que vous faites partie des journalistes aux opinions revendiquées, et j’aime bien ça, moi, les gens à opinions.
Du coup, je prends bien acte de vos tweets de ce matin sur les réfugiés musulmans. Et je vous comprends, humainement je vous suis bien sur ce terrain là, ces gens là meurent, et c’est atroce. Moi aussi je voudrais bien sauver tout le monde, j’ai bien conscience qu’ils ont faim alors que je suis au chaud avec mon chat à étudier l’achat d’un iphone. Je comprends bien que c’est choquant ce tweet de Marc Ailler (qui n’est pas “Monseigneur” pour moi, je ne suis pas catholique) qui veut bien accueillir les réfugiés chrétiens en pays basque, mais pas les autres. A première vue, enfin, vu de Paris et quand on est un homme, ça doit choquer, oui, sûrement.
Seulement voilà, moi je ne vis pas à Paris, je vis dans une “cité-dortoire” du 91, comprenez, une banlieue. Mais il y’a pire, je suis une femme, pas moche et pire que tout, avec une bonne grosse chevelure bouclée rousse. Et pas de voile dessus. Voyez-vous, mes proches m’appellent Mérida, en référence à la princesse Rebelle de Walt Disney. J’ai des cheveux, beaucoup, longs et bouclés. Et pas de voile dessus.
Et bien moi je comprends plus que très bien ce Mr Aillet. Parce que quand je sors de mon immeuble de 4 étages, j’essuie les regards méprisants des hommes de tout âge que je croise dans la rue. D’ailleurs je sors le moins possible, et avec ma mère, de préférence, à 2 c’est mieux. Bien sûr, pour vous, un homme, l’insécurité et la colère que l’on ressent quand on est une femme pas voilée parce que pas musulmane, en banlieue islamisée, c’est abstrait, je comprends bien, on n’a jamais craché à vos pieds quand vous passez à cause de votre manque apparent de signe religieux. […]
