Michel Houellebecq, islamophobe ? Interrogé par “The Guardian” à l’occasion de la parution de son livre “Soumission” en langue anglaise, l’écrivain ne le nie pas, mais explique que cette “phobie” tient davantage de la peur que de la haine. Philippe Portier, sociologue et historiens des religions, “décrypte” ces propos qu’il considère être une forme de stigmatisation.
[…] Comment qualifier le sentiment de “peur” qu’exprime Michel Houellebecq à l’égard de l’islam ? Est-ce une forme de racisme, tendant à essentialiser un groupe ? Ou plutôt un regard critique envers une pratique extrémiste de l’islam ?Pour ma part, je qualifierais les propos de l’écrivain de comportement de faible discernement. Comme une partie non négligeable de la population française, Michel Houellebecq, quand il s’exprime sur ce sujet, ne cesse de prendre l’islam comme un tout et en le réduisant à ces éléments les plus violents et excessifs, alors que ceux-ci demeurent très minoritaires.
Nous savons qu’il existe plusieurs écoles doctrinales de l’islam et des pratiques sociales et religieuses très diverses en la matière. Ainsi, les musulmans remettant en cause les principes de la République française par la violence sont infiniment rares. Bien plus nombreux sont ceux qui les acceptent et les défendent.
[…] Mais depuis 2-3 ans, nous observons à nouveau un pic très net : les Français sont de plus en plus nombreux à considérer l’islam comme une civilisation totalement incompatible avec les valeurs démocratiques de la France, ce qui n’est pas sans effet sur l’appréciation qu’ils portent sur les musulmans. Michel Houellebecq contribue à cette “extension du domaine de la peur” qui touche notre pays.Dès lors, la “peur” qu’exprime l’écrivain est globalement injustifiée, même s’il ne faut pas nier, comme l’actualité le démontre, l’existence de foyers ou d’individualités potentiellement terroristes.