Tribune de Marc Knobel, historien, directeur des Etudes du Crif.
Comment pourrais-je être insensible au sort des réfugiés syriens, irakiens, moi, dont les grands-parents, Juifs d’Ukraine et de Pologne, ont fui eux aussi, dans les années 1910, les pogroms, l’antisémitisme, la misère, l’expulsion, cherchant désespérément à être “heureux comme Dieu en France?”. […]
J’ai compris alors très tôt -à l’énoncé des récits de ma grand-mère- que, de toutes les gloires de la France, la plus grande des gloires est d’être le pays des Droits de l’Homme. La plus grande des gloires de la France est de proclamer non pas seulement son amour de la liberté, sa quête d’égalité mais son attachement indéfectible à la fraternité. […]
C’est ainsi que la France a accueilli tant bien que mal les légions d’Italiens fuyant le fascisme, d’Espagnols fuyant le franquisme, d’Allemands et d’Autrichiens fuyant le nazisme, de Slaves fuyant la misère, de juifs fuyant l’antisémitisme et tant d’autres.
Ils sont tous devenus nos concitoyens. Je dis bien, TOUS.
Alors, devrais-je oublier, moi qui suis juif, ce que je suis et d’où je viens? […]
Alors, aujourd’hui, n’en déplaise à certains : aux populistes d’extrême droite d’abord qui ne goûtent qu’à la peur, au racisme, au mépris; aux sectaires, qui ne goûtent qu’à l’égoïsme petit bourgeois; aux indifférents que rien n’interpelle jamais, que la France s’honorera à accueillir non pas toute la misère du monde mais quelques damnés de la terre.
Et je proclamerai aussi: ” j’ai décidé d’opter pour l’amour. La haine est un fardeau trop lourd à porter…” (Martin Luther King).