(…) Sophie Beau, traits tirés, valise à la main, “15 000 appels par jour” sur son portable, a une course contre la montre à gagner, une course pour la vie : cette humanitaire marseillaise de 42 ans, mère de quatre enfants, est la vice-présidente de “SOS Méditerranée”, un projet européen et citoyen de sauvetage des migrants, dans les eaux internationales entre la Libye et l’Italie.
Lancée sur Ulule il y a une semaine à peine, sa campagne de financement participatif y a effectué un démarrage “exceptionnel” : plus de 160 000 € déjà récoltés auprès de 2 000 personnes ! Emballée par cet élan citoyen, une banque, BNP Paribas, vient elle aussi d’accorder 50 000€. “Nous comptons obtenir l’engagement de grands partenaires, afin de trouver 1,2 M€”, expose Sophie Beau, qui a commencé à taper aux portes, ici, dans la cité phocéenne. Collectivités, entreprises, habitants : chacun peut contribuer à l’achat du Markab, ce bateau-pilote pour l’heure amarré en Croatie, et sans lequel rien ne sera possible. Long de 56 m et d’une capacité d’accueil de 400 personnes, celui-ci est adapté à la navigation en période hivernale. (…)
“SOS Méditerranée” n’est pas qu’un “nom génial”. C’est une histoire humaine extraordinaire. Une histoire qui raconte une autre Europe : pas celle de l’austérité, pas celle du repli sur soi, mais celle de citoyens qui montent en première ligne, “hors des agendas politiques” et par-delà les frontières.” (…)
Le plan de “SOS Méditerranée” est de collaborer avec les autorités italiennes, l’efficace Maritime Rescue Coordination Centre, “sur le principe du 15, comme une ambulance. Les Italiens réceptionneront les appels de détresse des migrants et nous dérouteront vers eux. Puis nous les débarquerons dans le port italien qui nous sera indiqué.” Il faudra beaucoup d’argent pour cela, “300 000€ par mois” après l’achat du navire. “Mais à l’échelle de l’Europe, tout est relatif”, balaie Sophie. “Peut-on accepter que des gens se noient ? Empêcher cela, c’est compliqué mais aussi très simple : c’est d’abord une question de moyens, donc de volonté.” (…)