Dans son essai «Situation de la France», Pierre Manent ouvre une brèche dans le ronron hystérique qui nous tient lieu de discussion sur l’islam. Il ne peut y avoir de «neutralisation religieuse de la société», quand bien même la laïcité organise celle de l’État. C’est à cette tentation de neutraliser la société, d’en évacuer le religieux, que Manent nous demande de ne pas «céder», «en acceptant franchement les mœurs musulmanes».
Cette tentation est forte au Front national ou chez des «Républicains», sous la forme d’interdiction de la visibilité religieuse dans la société civile, par exemple dans le travail. Elle existe aussi à gauche, qui espère que les musulmans vont devenir, le temps aidant, des «musulmans zombies» comme les catholiques de M. Todd, c’est-à-dire des croyants sans grandes pratiques, sinon sans croyances. Pierre Manent en doute, car il ne croit pas à l’inéluctable recul du fait religieux dans la modernité. La France est de fait le pays européen où la population musulmane la plus importante. […]
Au total, notre philosophe invite les musulmans à prendre part à notre «chose commune» et à notre «amitié civique», non pas en oubliant qu’ils sont musulmans, mais en tant que musulmans, «dans un pays de marque chrétienne, où les juifs ont une place éminente». Manent dit «ne pas partager l’indignation de certains devant la revendication d’heures de piscine différentes pour les garçons et les filles». S’il admet qu’il faut y réfléchir, il se demande s’il est «raisonnable de vouloir recomposer les mœurs musulmanes selon nos critères» (l’égalité homme-femme).
Merci à Lilib