Déserté par les familles qui en ont les moyens, le collège Las Cazes à Montpellier ,est fréquenté à 95% par des élèves d’origine marocaine.
Des élèves d’origine marocaine issus d’un même quartier qui se suivent de la maternelle à la troisième sans être confrontés à la moindre diversité : c’est pour dénoncer ce parcours «sans mélange ni ouverture» que des mères du quartier du Petit Bard, à Montpellier (Hérault), s’étaient mobilisées au printemps 2015.
«Nos gamins ont un problème d’identité, et c’est beaucoup plus grave qu’un problème d’intégration, s’inquiète Laurent. Ils ne se sentent pas français et ne sont pas marocains. Leur identité, c’est d’être musulmans.» «Cette question d’identité est très prégnante chez eux, enchaîne Chloé, prof de français. Ils disent “Vous, les Français”, comme si on ne pouvait pas être “tous français pareil”, comme s’il y avait les “vrais” et les “faux” Français.»
Las Cazes, tous les moyens sont bons pour l’éviter.» Et ces moyens fonctionnent : la moitié des familles dont les enfants devraient être inscrits dans ce collège n’y sont pas. Parmi ces «élèves manquants», environ un sur deux a été envoyé dans le privé. Les autres sont inscrits ailleurs, grâce au jeu des options ou des dérogations, lesquelles permettent notamment le regroupement de fratries dans un même collège. Des familles se munissent aussi de fausses domiciliations, obtenues grâce à des proches, pour contourner la carte scolaire. […]
Que s’est-il passé ? «Il y a une dizaine d’années, l’établissement a connu des violences, le climat s’est tendu et Las Cazes s’est vidé», raconte Nadia Allali, principale adjointe du collège. En 2006, un classement établi par le Point lui a décerné la médaille d’argent des collèges français les plus violents.
Pour Mustapha, prof de maths, «ce n’est pas le manque de mixité ethnique qui pose problème, mais le manque de mixité socioprofessionnelle et socioculturelle». […] L’équipe constate aussi que les relations filles-garçons sont plus tendues ici qu’ailleurs – peu de jeux mixtes, pas de flirts. Le foulard, ôté et remis devant les grilles, est plus présent qu’autrefois. Les collégiens, même les plus jeunes, respectent davantage le ramadan. Et pour la fête de l’Aïd, le collège est quasiment désert. «La pression du quartier y est pour quelque chose, estime Nadia. Ici, ce serait mal vu d’envoyer son enfant à l’école ce jour-là.» […]